A partir de la mi-mars, la situation Covid-19 à Hong Kong s'est emballée. Le retour de résidents hongkongais venant d'Europe ou des US a enclenché une hausse de cas. Rien à voir avec la situation en France mais ici c'était la panique. Alors que début mars le gouvernement avait annoncé la réouverture des écoles pour le 20 avril, dès le 20 mars ce plan était annulé jusqu'à nouvel ordre. Le pic d'infection au delà de 25 par jour a enclenché la fermeture des terrains de tennis, des parcs enfants, des clubs de voile... Plus d'activité pour les mômes la tuile. Au delà des après midi où il devenait compliqué d'occuper les enfants, c'est notre vie sociale qui en prenait un coup car on devenait infréquentable pour 2 semaines. Trois week-ends où l'on a donc mis à contribution le livre des randonnées qui avait jusqu'à maintenant peu été ouvert. Et ce fut un peu une révélation. La région administrative de Hong Kong couvre un territoire de 1 104 km2 soit 10 fois moins que l'île de France. C'est petit mais très divers, entre les forêts junglesques du nord (nouveaux territoires), les collines dénudées de l'île de Hong Kong, les îles grandes (Lantau, celle de l'aéroport) ou petites comme Po Toi tout au sud ou Peung Chau, Cheung Chau ou Lamma (à l'ouest). Le rythme a vite été pris, avec des rando quasi tous les après midi depuis mi mars. Les enfants ne se plaignent pas trop même si ils préfèrent quand on y va avec une autre famille avec enfants. Hélas le 8 avril le gouvernement annonçait qu'on ne pouvait pas être à plus de 4, sauf cas où l'on partage le même foyer pour toutes activités sociales : resto, ballade... Bref, on a commencé à faire des ballades tous les 5 puis, parce qu'il n'est pas simple de déterminer si deux familles marchent indépendamment ou ensemble, on a fait des marches à deux familles. On a enchaîné les randos : des petites puis des plus grandes et notamment des emblématiques, comme le Lions Rock. Le Lion Rock c'est un dénivelé de 500 mètres, d'une traite pour arriver sur un petit pic rocheux qui, avec un peu de bonne volonté, peut vaguement faire penser à une tête de lion. Ce rocher est un symbole très important ici. Dans les années 1970, une sérié télé devenue inconique ("Below the Lion Rock") vantait le "Lion Rock sprit" qui résume l'esprit de ténacité, de résillience, de créativité et de solidarité du petit peuple de Hong Kong. Il ne faut pas se leurrer : il s'agissait, pour l'essentiel, d'une entreprise de nation-building non-dénuée d'arrière pensée pour l'Etat colonial de l'époque. Après les grandes émeutes des années 1960, il fallait inciter les ouvriers sous-payés et tassés dans des appartements minuscules à accepter leur sort et leurs dûres conditions de vie et de travail. Il fallait aussi forger une identité hongkongaise distincte et promouvoir un modèle de société différent pour éviter que les hongkongais rejetent le pouvoir colonial et se jetent trop volontier dans les bras de la Chine communiste (n'oublions pas que Hong Kong était l'une des lignes de front de la Guerre Froide). Le choix du Lion Rock n'était pas innocent. Le pic est dans les Nouveaux Territoires et surplombe les quartiers très denses de Kowloon, qui ont accueilli, dans les années 1950 et 1960, des masses d'immigrés venus de Chine. Il s'agissait qu'ils se mettent au boulot, d'éviter qu'il regrettent leur choix, qu'ils rompent définitivement les ponts avec la mère patrie et développent un amour du modèle proposé par les anglais. C'était essentiel sur le moment pour la paix sociale, mais aussi pour l'avenir. La rétrocession des Nouveaux Territoires étant inévitable, avoir le soutien du peuple (et notamment dans ces territoires qui n'étaient qu'une possession britannique temporaire) permettait aux anglais d'avoir un atout supplémentaire au moment d'arriver à la table des négociations. Ca a plutôt bien marché. La chanson du générique de la série est encore connue de tous, et le "Lion Rock Spirit" fait aujourd'hui pleinement partie de l'identité des hongkongais. Pas étonnant qu'il soit aujourd'hui remis au goût du jour par les mouvements "anti-establishment", qui s'appuient sur les sentiments identitaires des hongkongais et tentent de construire une histoire de résistance du lion hongkongais, fier, courageux et obstiné, face au panda chinois, massif, puissant, mais borné, stupide et balourd... A l'automne dernier, au moment où les manifestations battaient leur plein, les protestataires ont entrepris plusieurs expéditions sur la tête du lion pour y derouler des banderoles géantes ou y erriger une espèce de statue de la liberté, petite soeur hongkongaise de l'éphemère déesse de la démocratie de la place Tiananmen. Bref, qui ne montant pas n'étant pas hongkongais, c'est évidement l'ascension à faire. Et on l'a fait. Les genoux furent douloureux mais d'en haut, on a une très belle vue sur la baie de Hong Kong et des tours de Kowloon qui emergent de la forêt (d'ailleurs, beaucoup recommandent l'assension en fin de soirée ou de nuit pour voir les lumières de la ville). Au-delà du Lion Rock, la découverte ça a vraiment été la multitude et la diversité des randonnées. En bord, de mer, dans la campagne, en forêt, sur les chemins de crête, aux abord des micro-villages faits d'une poignée de bicoques improbables construites de bric et de broc, à 1000 lieue des tours étincellantes de Central. Malgré la chaleur (il fait maintenant 30 degrés) on arrive à rester relativement au frais. Il y a évidemment les ballades autour des réservoirs, mais là on est souvent plus exposé au soleil. On est loin d'avoir tout fait d'autant que certaines ballades exigent de décoller tôt notamment pour prendre un bateau. On a déjà coché l'ile de Po Toi tout au sud, un air de Bretagne avec ses falaises déchiquetées. Il faut maintenant que l'on se motive pour les destinations tout au Nord-Est, des zones seulement accessibles en bateau avec des départs dès 8h30 à 30 mn de taxi de chez nous. On va essayer !
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