Je reprends la plume après quasiment 3 mois. 3 mois pour accepter que le dernier semestre avant notre retour en France ne serait pas l’apothéose rêvée. J’avais très tôt identifié les longs week-ends et les plages de vacances de 2020. J’avais pris très tôt les billets d’avion et fait le choix des hôtels. On était prêt, en tout cas on pensait que les enfants étaient prêts après le baptême du feu du Népal, pour les deux voyages qui me faisaient rêver dans la région : Le Tibet et la Mongolie. J’avais de plus calé sur les petits week-ends des A/R pour la baie d’Halong et le Yunnan. Tellement longtemps à l’avance que j’avais même oublié et avait validé le séjour de ma mère sur une période où on n’était pas censé être là. Bref, ces derniers mois je les voyais comme l’occasion de pousser les enfants plus loin dans les altitudes et dans les déserts et de les faire camper, rouler de longues heures pour découvrir ces grands espaces et aller à la rencontre de peuples totalement différents de ce qu’on avait visité en Asie de l’Est jusqu’à maintenant. Maintenant qu’Avril et Ulysse apprécient la lecture et que les trois sont plus autonomes notamment en marche, il paraissait envisageable de partir pour du pur itinérant, avec des trajets longs et des conditions de nuit sommaires. A notre retour de Malaisie il n’était pas encore évident que le monde avait basculé et qu’il fallait faire un profond ajustement dans notre mode de vie. C’était Hong Kong le second foyer du Coronavirus, à la porte Sud de la Chine. L’inquiétude en cette mi février était double 1) endiguer la contamination et donc fermer les échanges entre la Chine et Hong Kong et 2) éviter que le reste de monde, qui fermait ses frontières aux Chinois, ne mette les Hongkongais dans le même paquet. Mais au quotidien on était assez tranquilles : les enfants faisaient l'école le matin et ensuite partaient faire du bateau ou un camp de sport sur la plage, pendant que Pierre retrouvait ses copains pour faire du foot. On les a inscrit aussi à des cours de tennis. Au moins on avait l'impression que la fermeture de l'école avait ses avantages, d'autant qu'il faisait plutôt beau. C’est dans ce contexte, où c'était Hong Kong qui était au coeur de la tourmente, que je suis rentrée avec les enfants pour 2 semaines de vacances en France, à la fin février. J'avais un moment craint que l'on doive tout annuler si la France nous considérait comme des Chinois de Wuhan. Une fois en France, on a pu profiter un instant du soulagement d’avoir laissé la maladie derrière nous et de pouvoir vivre une vie normale. Dans l’avion Air France qui nous a ramené de HongKong à Paris, on a vite compris que l’avion était venu de France à vide et que les personnels navigants avaient été réquisitionnés. A l’arrivée à Roissy, l’équipe médicale était là pour vérifier notre température, récupérer notre déclaration d’itinéraire (pas de séjour en Chine) et nous donner des masques. Masques qu’on a enlevé dès la récupération des valises tellement on avait l’impression qu’on avait atteint le refuge. Tout s’est enchainé comme je l’avais calé depuis longtemps : les enfants au ski, moi à faire des cours en Egypte puis à Paris. Le vol retour était prévu pour le vendredi 13 mars. La date restera dans ma mémoire pour longtemps. Le dimanche 8 mars, Air France annonce qu’elle suspend les vols entre Paris et HK. La situation en France se dégrade en France, les vols sont vides et bientôt HK va imposer une quarantaine aux arrivants d’Europe. Le sauve-qui-peut commence dans l’autre sens : il faut rentrer à HK, ramener les enfants du Sud de la France en urgence, prendre n’importe quel vol. La chance est que je suis déjà de retour à Paris. Je passe une première après-midi, lundi 9 mars, dans la boutique Air France après des heures d’attente en vain au téléphone. Un premier rebooking par KLM, qui sera lui aussi annulé le lendemain. Une deuxième après-midi chez Air France le mardi 10 mars et un départ dès le lendemain matin après une récupération des enfants dans la nuit. J’ai tout planté : les cours, l’examen, les diners avec les amis, tout ce beau planning précisément construit. Evidemment, à Paris, il n’y avait pas encore de prise de conscience : personne n’a de masque et, pour tout le monde, l’épidémie est encore loin, même si on commençait à se méfier des Italiens en plus des Chinois.
A notre arrivée à HK, j’ai eu la sensation, comme à l’arrivée à Paris, d’avoir réussi une échappée salvatrice. Dès le lendemain les enfants ont rejoint leurs copains sur la plage et participé à des camps sportifs car après tout ils étaient en vacances. Mais trois jours plus tard, plus rien n’était possible. Il fallait attester, pour chaque inscription à des activités des enfants et même pour moi pour aller à l’université, que l’on était à HK pendant la quinzaine précédente. Annulation des sorties entre amis, les employeurs demandant à tous leurs employés de ne pas fréquenter les personnes ayant voyagé. Quelques jours plus tard c’est la quinzaine qui est imposée aux nouveaux arrivants : la plupart sont des étudiants hongkongais mis à la rue suite à la fermeture de leurs écoles en Europe ou aux US, des familles résidant à HK qui étaient partis en vacances ou même avaient rescolarisé leurs enfants en Europe ou aux US pour contourner la fermeture des écoles ici (plus de cours en présentiel depuis 23 janvier). Le nombre de cas à Hong Kong est reparti à la hausse, et les mesures se sont emballées. En plus du malaise d’être perçus à Hong Kong comme les responsables de cette seconde vague, il a fallu composer avec la fermeture de toutes les activités qui nous permettaient de respirer les après-midi après les matinées d’école à la maison. Même si les enfants ont plutôt bien géré le passage à l’école à la maison, ça n'a pas été totalement indolore, surtout pour pour gérer Pierre. Avant le séjour en France, on avait externalisé tellement c’était difficile de mettre Pierre au travail et de ne pas perdre son calme face à ses « J’ai pas envie, pas question, j’en ai rien à faire, ça ne m’intéresse pas, je suis fatigué, je ne le ferai pas…. » Il passait alors 2 heures à faire ses devoirs avec une jeune femme dans un café. En comptant l’heure de transport, on avait un peu la paix pour faire les devoirs avec les grands. Après le retour de France, Pierre a négocié de rester à la maison pour faire l’école. La routine qui s'est installé était donc celle où Matthieu gérait les deux grands sur la table du salon et moi, reconvertie en maitresse de CP, j'avais la lourde tâche de mettre Pierre au travail. Cette routine où nos matinées (de 8h15 à 12h30) étaient englouties dans l'école des enfants et les après midi étaient dédiés à notre propre boulot a absorbé notre énergie et il m’a fallu un peu de temps et la perspective d’une réouverture des écoles ici pour que je me remette au blog.
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