Le nouvel an chinois et l’avènement de l’année du rat s’annonçaient pourtant bien. La situation politique à Hong Kong semblait avoir retrouvé un peu de calme, et après avoir eu un peu froid au Népal pendant les vacances de noël, nous avions prévu d’avoir bien chaud en passant quelques jours en Malaisie. Ensuite, il s’agissait d’alterner entre des semaines à profiter de Hong Kong pour emmagasiner des souvenirs et des vacances dans la région : Tibet, Yunnan, Mongolie… Mais c’était compter sans l’invité surprise de ce début d’année : le grand méchant coronavirus. Les choses ont commencé à chauffer quelques jours avant les vacances du nouvel an et notre départ pour la Malaisie. La tension était visible à l’embarquement pour Penang et, même si on est habitué à voir des gens porter des masques pour un oui ou pour un non, il était tout de même saisissant de voir tous les passagers d’un avion cachés sous un masque. Peu de jours après, deux universités de Hong Kong ont annoncé une suspension des cours pendant deux semaines après les vacances. Elles ont été très vite suivies par toutes les autres, forcément. Il y a une logique là-dedans car les facs de Hong Kong accueillent beaucoup d’étudiants de Mainland, dont la plupart habitent en cité-U sur les campus, où l'on n'a guère envie de voir se propager un virus. Puis, très vite, la terrible nouvelle est tombée. Celle qu’on redoutait, qu’on disait espérer éviter même si on savait pertinement qu’on n’y échapperait pas : l'infernal et kafakaïen Education Bureau a annoncé la fermeture de toutes les écoles jusqu’à la mi-février. La fermeture du mois de novembre pour cause d’émeutes nous avait laissé un souvenir assez pénible (c'est raconté ici et dans les billets suivants). Etre enfermés dans l'appartement avec les enfants, devoir leur faire l’école à la maison sans possibilité d’aller travailler au bureau, passer son temps à scruter les infos pour savoir si l’école ré-ouvrira ou non le lendemain… c’était pas drôle. Là, on en prenait pour deux semaines d’un coup. La déprime. D’autant plus, qu’on savait bien qu’il ne fallait se laisser berner par le semblant de retenue de l'implacable Education Bureau : il était évident qu’on allait pousser la fermeture au moins jusqu’à la fin du mois… ce qui n’a pas tardé à être annoncé quelques jours plus tard, avec une fermeture jusqu’à la début mars. Et, là encore, on savait que la probabilité était grande qu’on irait plus loin. Bingo ! hier, on a encore ajouté deux semaines. La fermeture des écoles va donc durer jusqu’au 16 mars… mais on vous parie une demi-douzaine de dim sum qu’on ira au moins jusqu’à la fin mars. Comme du 1er au 15 avril c'est les vacances de Paques au lycée français, on parle tout de même de 3 mois de fermeture d'école. La fermeture des école, on s’en doutait dès les premières infos arrivant de Wuhan. Chaque année ou presque, les écoles ferment une semaine pour tenter d’enrayer la grippe hivernale. Alors il était certain que l'insensible Education Bureau n’allait pas laisser passer une si belle occasion. Plus généralement, à Hong Kong, la peur des maladies infectieuses fait partie du paysage et il n’est pas besoin de vivre longtemps ici pour la découvrir. Le musée de médecine (un peu nul, mais dans un très joli bâtiment colonial en briques rouges) y consacre d’ailleurs une grande partie de son espace. Depuis les tous premiers temps de son développement économique et urbain, Hong Kong a toujours été un lieu de très forte densité et de migrations incessantes. La peste de la toute fin du XIXe siècle a marqué les esprits, ainsi que les craintes d’épidémie massives liées à l’arrivée (et l’entassement dans des bidonvilles) de chinois n’ayant pas bien perçu tous les bienfaits du grand bond en avant ou de la révolution culturelle. Et puis, il y a bien sûr le SRAS. A l’hiver 2002-2003, la maladie est apparue à Canton, mais a été très tôt importée à Hong Kong qui est devenu un des foyers importants de l’épidémie. Au final, le palmarès de ce méchant coronavirus de 2003 n’est pas si époustouflant : 1 600 cas à Hong Kong et 204 morts. Mais la ville a été mise sous cloche, avec beaucoup d’interdictions de déplacement, ce qui a fortement marqué les esprits. C’est peu dire. Il nous est très souvent arrivé d’avoir entendu des hongkongais (ou des expat vivant ici depuis longtemps) nous parler de cette épidémie, pourtant vieille de près de 15 ans, avec des trémolos dans la voix. « Oh, tu sais, depuis le SRAS, ils désinfectent régulièrement », « lui, il est riche : il a investi un paquet au moment du SRAS, quand l’immobilier était au plus bas », « Oui, avec les émeutes, l’activité économie ralentit un peu, mais rien de comparable avec le SRAS », etc… Bref, on avait le sentiment d’être de la bleusaille : si t’as pas connu le SRAS, tu connais pas vraiment Hong Kong. Bon, et bien sur ce coup là, on y est. Donc, nous étions là, en vacances en Malaisie quand les nouvelles des fermetures en cascade sont arrivées. La situation génère un brainstorming général tout autour de nous. Faut-il ne rien faire et attendre que ça se passe ? Faut-il se rapatrier définitivement ? Faut-il envoyer les enfants chez les grands-parents où l’air est plus sain et les adultes plus disponibles ? Faut-il prolonger les vacances et regarder tout cela de loin ? Les forums WhatsApp ont pas mal chauffé. Nous, nous avons opté pour la dernière solution. En quelques clics, on a changé notre vol de retour et réservé des hôtels pour rester en Malaisie dix bons gros jours de plus. Finalement, pourquoi s’encombrer de bagages : on peut très vivre deux semaines avec un short et trois T-shirt par personne. Bien sûr, ce n’était pas vraiment les vacances. Il fallait qu’on fasse semblant d’être en télétravail à Hong Kong et il fallait faire l’école aux enfants. Sur ce coup, le Lycée français a mieux réagi qu'en novembre. Chaque prof a du préparer des cours et des exercices en ligne pour que les élèves puissent travailler. Certains font ça plutôt bien, avec des leçons très claires suivies d’exercices, le tout parfaitement organisé de façon que l’enfant soit aussi autonome que possible. D’autre le font beaucoup moins bien, en balançant un fatras de documents avec des noms absconds dans des formats divers. Les conditions de travail n’étaient pas idéales : un seul ordinateur, pas d’imprimante et pas même de cahier avec des carreaux Seyes, cet indispensable fleuron du savoir-enseigner à la française. On a tout de même passé de bons moments, à faire des dictées et des calculs, assis à la table de la cuisine de nos airbnb de fortune ou installés sur les terrasse des hôtels plus confortables. Cette période était aussi marquée par une forte incertitude. La progression de l’épidémie était rapide et semblait n’être dépassée que par celle des mesures de protection : confinement de villes chinoise, mises en quarantaine, fermetures de liaison aériennes, annulation d’évènements (concerts, expos, entrainement de rugby, etc, une à une les activités qui structuraient notre vie hongkongaise sont tombées – on suivait ces annonces sur nos téléphones avec le sentiment d’impuissance des généraux en déroute listant les bataillons perdus). Notre principale crainte concernait la fermeture des liaisons aériennes. Et si la Malaisie, comme le Vietnam ou les Philippines, coupait les ponts avec la Chine et Hong Kong ? On ne peut quand même pas rester là. Et si on rentre en France et que la mère patrie, comme les Etats Unis ou l’Australie, stoppe les avions ou impose une quarantaine à tous ceux qui arrivent de Chine ? Les enfants ne pourraient pas aller au ski et Sandra ne pourrait pas aller faire cours en France et en Egypte. L’une des bonnes nouvelles a été la décision du gouvernement de Hong Kong de fermer sa frontière avec la Chine. C’était important pour freiner l’arrivée de l’épidémie à Hong Kong, mais surtout à nos yeux, pour que le monde entier puisse dissocier Hong Kong du reste de la Chine. Après tout, dans l’état des choses, peu importe qu’un milliard et demi de chinois soient assignés à résidence, tant que nos petites personnes ne subissent pas le même sort. Cette histoire de fermeture de frontière était d’ailleurs assez intéressante à suivre. La pression pour le faire était forte. D’un côté les « pro-démocratie » y voyaient autant une mesure de bon sens qu’une source réjouissante de china-bashing. De l’autre, les « pro-establishement » avaient à cœur, après leur déculottée aux élections de novembre, de brosser l’électorat dans le sens du poil en démontrant qu’ils se préoccupaient d’avantage des problèmes concrets des hongkongais que d’obéir aux injonctions de Pékin. Mais le gouvernement de Hong Kong était quand même bien embêté : comment fermer cette si sensible frontière sans froisser le tout aussi sensible maître de Pékin ? Alors, ils ont fait ça à la chinoise : en le faisant sans dire ce qu’ils faisaient tout en étant bien conscient que tout le monde savait qu’ils le faisaient. Après tout, l’important est de ne pas perdre la face. Ils ont donc fermé doucement le robinet, en interdisant les transits dans une moitié des points de passage. Puis, deux jours après, ils ont fermé les autres postes frontière, sauf deux pour laisser passer les marchandise. Puis, ils ont imposé une quarantaine de 15 jours à tous ceux qui viennent de Chine. Ainsi, c’est pas fermé, mais charge à celui qui veut venir de Mainland de trouver un moyen de venir et de s’enfermer deux semaines chez lui ou dans son hôtel. Ceux-là se préparent à monter dans l'avion pour rentrer à Hong Kong Après cela, la situation a semblé trouver un point d’équilibre, et nous sommes rentrés à Hong Kong. De toute façon, on ne pouvait pas vivre deux mois à l’hôtel et il fallait bien que les adultes se montrent à leur travail. On a retrouvé un Hong Kong très calme, bien sûr. Mais pas totalement fermé. Côté enfants, on a gagné en productivité en récupérant ordinateurs et imprimantes (sans oublier les carreaux Seyes). Sandra a fait un programme aux petits oignons. En gros, on passe nos matinées à la maison à faire les devoirs : l’un avec Pierre, l’autre avec les deux grands. L’après-midi les adultes vont travailler et on se débarrasse des mômes soit avec une playdate, soit un cours de tennis, soit – pour les deux grands – un cours de voile. Ils avaient déjà fait un stage d’optimiste l’été dernier et avaient bien aimé. Maintenant, il fait un vrai temps de breton, mais ça n’entame pas leur enthousiasme. Ils vont finir en vieux loups de mer. Pour l’instant, ça se passe bien. L’ambiance est bonne et les enfants travaillent à peu près correctement. Bon, bien sûr, on a mis la pédale douce sur l’anglais et complètement passé à la trappe les cours de mandarin. On a même l’espoir d’arriver à débloquer Pierre, qui bute encore pas mal sur la lecture (il faut dire que les deux autres étaient, pour leur CP, aux petits lascars dans des classes de 10 élèves, alors que lui doit batailler en classe bilingue entre le français et l’anglais – il patauge un peu). Pierre a même droit à quelques cours particuliers avec une maîtresse qui lui fait faire une partie de ses devoirs dans un café de l’ile de Hong Kong. Pour le reste, la vie à Hong Kong est ralentie, mais pas inexistante. Les gens vont et viennent, et semblent vivre plus ou moins normalement… à ceci près qu’ils portent tous des masques chirurgicaux. Enfin, pas tous : quelques uns – généralement les « western » -, dont nous, se baladent encore fièrement le nez à l’air. C’est assez impressionnant ces visions dystopiques, et ça va tellement bien à l’univers de Hong Kong qui a déjà, en temps normal, des airs de film de science-fiction dépressif. D’ailleurs, dans le genre dystopique, je suis accro à ce site gouvernemental (ici) : on peut y suivre en direct le nombre de cas suspects, le nombre de cas, confirmés, le nombre de morts… Mieux, on y voit la localisation précise de la résidence des malades, et de ceux qui sont en quarantaine. Dingue ! Aujourd’hui, on en est à 56 cas confirmés à Hong Kong. C’est 0,00075% de la population. Mais ça monte… et tant que ça monte, ça veut dire que l’épidémie est là et que les écoles et les universités ne vont pas rouvrir. Mon site internet préféré du moment
L’an passé, les vacances de noël nous ont amenées en Birmanie. Cette année, on a poussé un peu plus loin pour explorer les contreforts de l’Himalaya, au Népal. C’était aussi l’occasion d’approcher l’Asie du Sud et la culture indoue sans pour autant plonger dans le chaos de l’Inde. C’était deux semaines bien dépaysantes. Le Népal ne ressemble à rien de ce que nous avons pu voir jusqu’à maintenant. C’était aussi deux semaines un peu fatigantes. Le pays est pauvre et, même si le climat est plutôt tropical, il faisait bien froid en ce mois de décembre pour nos petits organismes habitués au climat hongkongais. Les nuits étaient assez fraiches (4-5 degrés) et l’isolation et le chauffage n’est pas le point fort de l’habitat local. La plupart des hôtels proposaient au mieux une clim réversible poussive, au pire rien ou un petit chauffage électrique ressemblant à un grille-pain et qui produit plus de lumière que de chaleur. Trouver un restaurant avec des fenêtres plutôt qu’une simple terrasse ouverte à tous vents était aussi un challenge de tous les jours. Bref, on a vécu sans vraiment quitter nos polaires et doudounes et on a eu peu de moments cosy pour se détendre. Mais on a pu éviter les rhumes et profiter des après-midi ensoleillés. C’était aussi un peu rude pour les enfants. Le Népal n’est pas une destination hostile aux enfants, mais c’est pauvre, bien déglingué et c’est peu dire qu’il n’y a pas beaucoup d’activités véritablement child-friendly. Nos trois gamins ont cependant supporté ces contraintes sans râler (même s’ils ont souvent rêvé à haute voix de pizza et de piscine et envié leurs copains d’école qui passaient leurs vacances les fesses dans l’eau en Thaïlande). Au final, on revenu assez fiers des capacités de résilience de nos petits routards, qui se sont amusés à cocher les principes clés de la vie de backpackers (se gaver tant que possible au petit-déjeuner, ne pas mouiller ses habits, profiter des moments de soleil, se laver rarement - ça c'est pas trop dur pour eux, manger beaucoup de riz et de bananes…). Notre voyage a commencé par un trajet en train pour Canton où l’on a pris un avion pour Katmandou. On était bien chargés car on a joué les transporteurs pour une française de Hong Kong qui s’active pour association venant soutenir quelques enfants Népalais en difficultés. Les premiers pas en ville nous ont mis immédiatement dans l’ambiance. Avis à tous ceux qui rêvent de sérénité, de méditation et de connexion avec les puissances de la nature : oubliez Katmandou. La ville est complètement foutraque. Des petites rues bondées, des vieilles maisons toutes déglinguées, des gens qui pellettent partout des grands tas de sables et tordent des fers à béton, des micro-temples qui dégoulinent de crasse, de poudre colorée, de fleurs fanées et de cire fondue, des poulets, des grosses motos, des chèvres, des petites voitures, des vaches… La ville est foutraque, mais l’ambiance est assez détendue. Les népalais sont plutôt gentils et discrets. Pas de foule pressante, pas de vendeurs collants, pas de négociations acharnées pour acheter la moindre babiole, pas de regards louches ou envieux, pas de sentiment d’insécurité. Tout au contraire. La plupart des népalais parlent au moins un peu anglais et beaucoup le parlent très bien, ce qui est très confortable et permet d’échanger avec les gens. Et ils sont souvent sympathiques, aiment discuter et sont toujours prêts à aider. Le premier jour, nous nous sommes acquittés de notre tâche de transporteur en allant déposer nos deux gros sacs remplis de doudounes toutes neuves et de vêtement usagés dans l’école à qui ils étaient destinés. Bientôt, certains gamins auront donc la joie de gambader dans des uniformes du lycée français de Hong Kong ! L’école était toute neuve, et très pimpante bien que plantée dans une périphérie de Katmandou faite de routes en terre, de maisons pas finies et de magasins improbables et poussiéreux. On y a passé la matinée, à faire des puzzles avec les gamins de l’école, tous en doudoune dans la salle de jeu. On s’est ensuite attachés à visiter la ville et ses nombreux temples. Beaucoup ont souffert du tremblement de terre, mais les reconstructions vont bon train. On n’a pas affaire à de très grands temples, bien circonscrits. Au contraire, les édifices religieux bouddhistes ou hindous sont de petites constructions carrées disséminées ici et là. La grande place Durbar en accueille cependant plusieurs, en face de l’ancien palais royal et de la maison qui accueille les Kumari (ces fillettes-déesses qui vivent cloitrées dans leur petite cage dorée jusqu’à ce que la purberté les prive de leurs pouvoirs divins et qu’on les remplace par une plus jeune). Le tout est très joli, avec beaucoup de briques, de bois finement sculptés, etc. Des temples et des stupas, il y en a aussi plein de tous petits, au milieu de la rue ou cachés dans des cours d’immeubles que l’on découvre en s’en enfilant dans des petits passages tortueux. Et puis, il y a le grand stupa de Bodnath, gros gâteau blanc surmonté de son chapeau doré d’où vous regardent les yeux du Bouddha, et autour duquel les fidèles tournent en rond en secouant des moulins à prière. On adore ! Une mention particulière pour la visite très instructive du palais royal. C’est un palais moderne, type années 50, qui a conservé son mobilier diablement vintage : un mélange de cabinet de curiosité (les tapis en peaux de tigre saupoudrés de boules de naphtaline, les photos des visiteurs officiels – de Mitterrand à une belle brochette des pires dictateurs des années 70 et 80, etc), et de maison d’apparatchik soviétique (postes de TV japonais dernier cris en 1985, cendriers publicitaires, couvre lits qui évoquent les chambre d’hôtel des films de gangster de notre enfance, etc). Le piquant de cette affaire est que le palais royal a été le lieu d’un massacre dont les détails factuels ne sont nullement épargnés au visiteur. En 2001, le prince héritier a profité d’une réunion de famille pour dessouder son papa le roi et toute la dynastie. Il a été retrouvé grièvement blessé. Il sera aussitôt intronisé roi avant de mourir dans la foulée et laisser le trône à son oncle. On soupçonne ce dernier, qui avait opportunément décliné l’invitation à la réunion de famille, d’avoir manipulé son neveu. Mais c’est pas très clair. Le bénéfice a été de toute façon maigre : le tonton a été destitué en 2008, et la monarchie Népalaise renvoyée dans le folklore de l’histoire. On a ensuite passé deux nuits dans les anciennes villes royales de Patan et Bhaktapur. Bon, en vrai, c’est juste en banlieue de Katmandou, et il suffit d’une grosse demi-heure entassés dans l’un des petits taxis de la ville pour y arriver. Mais cette petite distance permet tout de même de changer d’ambiance et trouver un peu de calme. Au menu ? Et bien, des temples, des grandes places avec des temples devant un ancien palais royal… Bref, tout pareil ou presque. Une mention spéciale pour la promenade qui nous amenée à longer une immense fabrique de briques : sur des hectares, des milliers de briques en train de sécher avant d'être ammenées à la briqueterie pour les cuire, et des hommes, femmes et enfants qui travaillent accroupis à mouler/démouler des briques à même le sol ou à en transporter des piles sur le dos. C'est une chose de voir la misère dans les rues, mais le dénuement, la dureté du travail et la mocheté de tout cela nous a marqués bien plus. Une des rares fois où l'on a senti les enfants s'interroger un instant sur leurs vies d'extrême privilégiés. Un des moments les plus marquant de notre passage dans la vallée de Katmandou, c’est lorsqu’on s’est retrouvés à la tombée de la nuit dans le temple de Pashupatinath. C’est en fait un grand ensemble de temples et bâtiments divers construits de part et d’autre du fleuve Bagmati – qui ressemble ici une petite rivière. A l’heure du coucher du soleil, les terrasses successives qui encadrent le cours d’eau se remplissaient progressivement d’une population tranquille, discutant par petits groupes, alors que d’autres s’affairaient à allumer de grands feux de bois sur les bords du fleuve. Une fois la nuit tombée, un prêtre, quelque part sur une terrasse, s’est mis à psalmodier dans un micro pendant que la foule rassemblée l’accompagnait par des exclamations sporadiques. Et puis, on a apporté les cadavres. Là, au milieu des gens et presque sur nos pieds, allongés sur des petites civières et couverts d’un simple linceul blanc. Discussion entre les enfants : « Tu crois que c’est un mort ? Ben oui, on voit les cheveux ! ». Charmants bambins, pas plus impressionnés par la proximité de la mort que la foule des hindous rassemblée. En pleine nuit, dans un temple à ciel ouvert simplement éclairé par les brasiers, enveloppés d’un peu de brume et de fumée, entourés de la foule psalmodiant, on avait le sentiment d’être partis très, très loin de chez nous… voire d’avoir traversé l’écran de télé pour plonger dans un remake d’Indiana Jones. On est resté un moment, un peu fascinés. Mais il commençait à faire froid et je ne tenais pas à ce que les enfants assistent à la crémation qui se préparait à 2 mètres d’eux, alors on a brisé la féérie et on est partis retrouver la civilisation. L’étape suivante, c’était Pokara. C’est pas très loin, à l’ouest de Katmandou. Pas très loin, mais quand même quelque chose comme 6 heures de voiture. Pour couper court, on a opté pour l’avion. Bien sûr, toutes les compagnies aériennes népalaises sont sur la liste noire des pires du monde. Mais il parait que tant qu’on ne s’approche pas trop de la haute montagne, ça va. Et puis, de toute façon, ça peut difficilement être plus accidentogène qu’un voyage dans un minibus déglingué sur les routes incertaines du Népal. Pas de pot, ce matin-là, Pokara était dans le brouillard. Aéroport fermé, vols retardés. Au final on a passé 5 heures à attendre dans une salle d’embarquement bondée. Les enfants ont pu se gaver d’Ipad : C’est l’un de leur meilleur souvenir de vacances ! Alors qu’on commençait à désespérer, le brouillard a fini par se lever, et on a pu s’embarquer dans notre coucou pour 20 petites minutes de vol (du coup, les enfants, n’ont pas compris et se sont sentis spoliés : qu’est-ce que c’est que cet avion où l’on a si peu de temps pour faire de l’Ipad ??). Pokara est une ville posée en bordure d’un grand et joli lac, au pied des Annapurna. C’est d’ailleurs le camp arrière de tous ceux qui veulent s’élancer à l’assaut du massif. Nous, on est resté sagement en bas pour profiter des paysages, du grand calme (surtout après Katmandou), et du confort relatif offert par cette ville très touristique. On a fait un peu de shopping et quelques balades sympa, offrant de belles vues sur les montagnes enneigées. On a aussi visité le musée des conquêtes de l’Himalaya (photos, matériel... d’ailleurs, saviez-vous que les sherpas, c’est le nom d'une toute petite ethnie – en fait, une grande famille – qui s’est spécialisée dans l’accompagnement en montagne) et celui des Gurkhas, ces militaires d’élites népalais dont le courage et la fidélité sans faille a été largement exploitée par les Anglais qui, aujourd’hui encore, les enrôlent volontiers dans leurs troupes de choc). De là, on s’est engagés dans une journée de rafting. Réveil à l’aube et quelques heures de trajet en jeep pour arriver près d’une grande rivière. On appréhendait deux choses : mourir noyés (ou perdre un enfant dans les eaux tumultueuses) et mourir de froid (ou perdre un orteil dans les eaux glacées). On a été rassurés sur le premier point car notre guide nous a dit qu’il allait partir d’un peu plus bas que prévu pour éviter les rapides les plus violents. Sur le deuxième, c’était plus limite. Ce jour-là, toute la région était sous le brouillard. Or, dès qu’il n’y a plus de soleil, ça caille au point qu’il nous semblait totalement absurde de quitter nos doudounes et aller mettre nos pieds dans l’eau. Mais, le temps d’arriver sur place et d’enfiler une combinaison de plongée au-dessus de nos pull en polaire, le soleil a fait une timide percée. Au final, on a passé quelques heures à descendre paisiblement la rivière. Quelques petits rapides pour nous égayer un peu et nous éclabousser d’eau glacée, mais pas assez pour nous faire peur ni même nous empêcher de profiter du paysage. Cette descente de rivière nous a amenée non loin de Bandipur, un très charmant village de montagne. On y trouve de jolies maison et une vue dégagée sur la vallée et les montagnes au loin. Mais c’est un peu en hauteur, il y fait froid, et les petits hôtels sont bien mal équipés. Sandra et moi avons pu profiter d’une « warm room » (comprendre : orientée au sud), mais les enfants, de l’autre côté, ont dormi avec tous leurs habits, doudoune comprise, ce qui les a d’ailleurs plutôt ravis. De là, on n’était plus très loin de notre prochaine étape : le parc national du Chitwan. Ouh ! Le confort d’un resort avec de grandes chambres chauffées, d’un petit déjeuner copieux sur une terrasse glaciale mais offrant une très belle vue sur une rivière et une prairie où passent quelques éléphants. Ajoutez à cela un bon nombre de chiens errants mais gentils, des feux de bois installés tous les soirs dans lesquels les garçons ont pu touiller… le bonheur. Le parc offre aussi un certain nombre d’activités bien adaptées aux enfants. Une partie de pèche dans la rivière (on s'équipe d'un tamis en bambou et on racle le fond pour récupérer des micro poissons). Un tour dans le village où ils ont pu organiser une grande partie de balle dans la poussière et la boue avec les gamins du coin. Un moment à déambuler avec des éléphants (après deux passages dans une réserve d'éléphants à Chiang Mai les années précédentes, les enfants les considéraient avec autant de curiosité que si c'était des autobus). Une descente de rivière en barque où l'on a pu admirer plein de crocodiles affalés sur les berges. Une belle promenade en forêt, aussi. L’idée, sur ce coup, était d'apercevoir des animaux sauvages, et on a bien retenu toutes les consignes de sécurité : face un ours, regroupez-vous, faites de grands gestes et de grands bruits, face à un tigre, ne le quittez pas des yeux, ne clignez pas, ne bougez pas, sauf à reculer tout doucement, face à un rinho, enfuyez-vous en courant en zig-zig, face à un éléphant, partez au plus vite et priez parce qu’il n’y a pas grand-chose à faire. Il va de soi qu’on n’a vu rien de tout cela... Enfin, une journée complète a été consacrée à un vrai safari. Juchés sur une jeep, on a arpenté tout le parc à la recherche des rhinocéros et des tigres du Bengale. A notre tableau de chasse : des daims, des paons, un python, une empreinte de tigre dans la boue et deux oreilles de rhino dépassant au-dessus des herbes. Un peu maigre pour 6 heures à cahoter dans le froid… Après tout cela, retour à Katmandou (15 minutes d’avion au-dessus des montagnes) où l’on a passé des moments agréables et instructifs avec mon oncle et ma tante, venus comme chaque année travailler pour leur petite ONG. Sandra a remplis nos bagages de bols chantants, de pantoufles pour les enfants, et autres babioles, et on s'est envolés pour Canton. Les températures ont baissé d'un coup. On vient de remiser les T-shirts et les shorts, et d'investir dans des doudounes en prévision de nos vacances au Népal. Dimanche matin, à 8h15 quand il a fallu enlever le blouson pour l'entrainement de rugby ça a un peu piqué mais bon après quelques foulées et un bon soleil, l'entrain est revenu. Surtout pour Pierre qui faisait sa première compétition : 4 mini matchs, 2 victoires et 2 nuls. La tête était haute à la fin de la matinée. Après cet échauffement on a continué sur notre lancée sportive avec du vélo, sur les pistes cyclables de Shatin. Avril étant à une fête d'anniversaire, on a pu faire une virée à 4 pour que les garçons perfectionnent leur technique encore un peu hésitante. Deux heures sympa et sans chute. Il faudra réitérer pour être totalement confortable mais on commence à envisager des activités vélos pour nos prochaines vacances. On va retourner au Vietnam en mai et cette fois ci, chaque enfant aura son vélo. Et.. je vise la Mongolie, à vélo et à cheval cet été !!!
Ce lundi on a récupéré les photos de classe. Commençons par Ulysse qui n'était pas content de sa tête sur la photo. On vient d'apprendre que son meilleur copain, Enzo (à sa droite) avec qui il était depuis notre arrivée (au Petits Lascards puis au LFI, 4 ans dans la même classe), s'en va. Sa famille part en Allemagne à Noël. Il semble qu'il y a beaucoup de départ cette année, sans attendre la fin de l'année scolaire. Ce n'est pas clair si ce sont les manifestations qui ont amené des ruptures de contrat ou si les familles ont cherché plus intensivement une porte de sortie (c'est le cas de la famille d'Enzo qui était là depuis 10 ans je crois). Dans la classe CP bilingue de Pierre, deux maitresses, une pour le français, une pour l'anglais. Pierre a pas mal de difficultés entre les nombreux alphabets: il confond script anglais et attaché français. La différence entre minuscule et majuscule aussi c'est pas son fort non plus. Mais bon sa maitresse est rassurante.. on essaye de lui faire des travaux d'écriture mais il n'aime pas tellement. Dans la classe CM2E, Avril s'épanouit complétement. Elle vient de ma présenter sa liste pour sa fête d'anniversaire à venir: 14 noms, 10 filles et 4 garçons (ça c'est la bonne nouvelle, l'année dernière elle n'avait invité que les jumeaux, fils de nos amies). De sa classe elle n'a invité qu'un garçon, parce qu'il est drôle, Eliott, en dessous à gauche d'elle. C'est le fils du prof remplaçant de Pierre l'année dernière, qui vient de la Réunion. Je l'avais rencontré lors d'une sortie, il est effectivement très chouette. Il ne parlait pas un mot d'anglais mais était vraiment sympa et doux. Je vais découvrir 3 filles que je ne connais pas encore mais cela sera difficile de remplacer Paola, à la droite d'Avril sur la photo, avec qui on a fait plusieurs sorties en famille et le petit club comprenant Iluh, Juliette et Hanaë qui date de l'année dernière. Bizarrement, les enfants malgré leurs liens forts avec leurs copains de l'école, ne semblent pas s'inquiéter d'un retour en France. Je pense qu'ils ne se rendent pas compte. Ils semblent un peu confondre départ en vacances et départ pour la vie. En même temps ils ont l'habitude de découvrir de nouvelles personnes, j'espère qu'ils seront aussi enthousiastes en septembre prochain. Il faudra voir également si les relations avec les copains de Hong Kong tiennent pour qu'on aille leur rendre visite une fois qu'ils seront rentrés en Europe, eux aussi.
Le week end dernier nous sommes retournés au parc de loisir camping de Saiyuen. Dès l'arrivée sur l'île de Cheung Chau on est saisi par le dépaysement. C'est tranquille, ça sent la marée. Les gens se déplacent en bicyclette. Maintenant que l'on a des tentes, le week-end vaut vraiment le coup. A peu de frais on peut profiter de l'espace et de la tranquillité de ce parc peuplé de biquettes, où les enfants disparaissent. Les garçons d'un côté et les filles de l'autre. Les filles discutent et s'occupent avec les chèvres. Les garçons font des cabanes et bricolent autour du feu. Cette fois-ci on y est allé avec 5 autres familles qui avaient des filles de la classe d'Avril mais la bonne surprise c'est qu'il y avait également des garçons et qu'on est tombé sur une autre famille française avec des garçons de l'âge d'Ulysse et de Pierre. Tous étant dans le Lycée français ils se connaissaient vaguement et on aurait dit qu'ils étaient meilleurs amis depuis des lustres. Bref, les parents ont pu se relâcher. C'est d'autant agréable que l'on a plus de petits et donc on est de moins en moins sollicités même par Pierre pour gérer ses affaires (pipi, soif, faim etc.). Bon il y a évidemment des limites, et c'est souvent pour la recherche de leurs copains ou de leurs affaires qu'ils réapparaissent, mais c'est furtif. Le camp organise diverses activités: tir à l'arc, bubble soccer, djembe... Au programme des adultes, bbq et repos au soleil. Le temps passe vite, il faut replier les tentes, reprendre le bateau et replonger dans la fin de week-end typique: argh les devoirs, argh il faut se laver... Les enfants osent un "je ne veux pas aller à l'école lundi". Je peux comprendre que le rythme des précédentes semaines leur a faussement donné l'impression que les loisirs sont la norme et l'école c'est l'exception.
Dans trois semaines c'est les vacances de Noël, ensuite 3 semaines d'école et c'est Chinese New Year, ça risque de ne rien arranger. Pauvres enfants. Back to school ! La bataille de PolyU où des étudiants et lycéens étaient retranchés, façon fort Alamo, touche à sa fin. En fait, non, les étudiants n'y étaient pas retranchés. Ils ont commencé à occuper la fac, puis ils ont été cernés par la police qui a tenu le siège pendant plusieurs jours en refusant de laisser partir les protestataires et en bloquant les tentatives de fuite dans le but de tous les arrêter. Or, ici, à Hong Kong, la menace d'une arrestation dans un évènement de ce type n'incite pas à rendre les armes. Ceux de PolyU qui ont été arrêtés ne vont pas juste faire un tour de panier à salade, suivi d'une peine de sursis ou, au pire, de quelques mois fermes. Ils risquent une inculpation pour émeute, assortie de 7 à 10 ans de prison ferme. Cette stratégie sans concession des autorités a bloqué la ville pendant 5 jours et laissera sans doute une cicatrice très amère dans l'esprit de beaucoup de hongkongais. Les images de parents se rassemblant devant PolyU pour supplier qu'on laisse sortir leurs ados, de prêtres tentant de plaider auprès de la police et d'étudiants rejouant la grande évasion en s'échappant par les sous-sols ou en descendant d'un pont en rappel, ne sont pas du genre à reconcillier la population avec la police et le gouvernement. Mais ne boudons pas notre petit plaisir. Après dix jours d'interruption, les écoles ont réouvert. L'annonce officielle hier après-midi a été saluée par des salves de messages de liesse sur tous les groupes WhatsApp de parents d'élèves. C'est donc tout joyeux qu'on a déposé les enfants ce matin dans leur bus scolaire jaune. Même eux, je pense, étaient contents de retourner à l'école, revoir leurs copains et se changer les idées. Mais, quand ça veut pas, ça veut pas... Après une tentative pour aller à la fac, Sandra est revenue : le métro desservant notre université est fermé. Pas grave, car sans enfants dans les pattes, ce n'est pas un problème de travailler à la maison. Mais à 9 heures, on reçoit un message WhatsApp de la companie de bus scolaire : Le coup de l'accident de bus, j'avoue qu'on ne s'y attendait pas. Rien à voir avec les émeutes, c'est juste pas de chance. Bon, a priori, tout le monde va bien (y compris le bus) et ils devraient finir par rejoindre leur école (mais en attendant, ça fait déjà une heure et demie qu'ils poireautent sur le bord de la route).
Quand on pense que cela peut se calmer, cela repart de plus belle. La bataille autour de Hung Hom et du campus de Poly University fait toujours rage mais les étudiants sont coincés. Au lieu de demander du renfort ils ont appelé à du "blossoming" ce qui veut dire à une "floraison" des affrontements au quatre coins de Hong Kong pour faire diversion et obliger les forces de l'ordre à se disperser sur les différents fronts. Du coup, les heurts se rapprochent de chez nous, le long de Austin road, Jordan road et Nathan road. Le tunnel central fermé amène un contournement vers chez nous (via le tunnel ouest)... et donc c'est le bazar. Pas une très bonne nouvelle. Autre mauvaise nouvelle, enfin en fait plutôt une bonne du point de vue de la survie d'un système judiciare indépendant, la loi anti-masque votée il y a quelques mois pour mettre fin aux manifestations de personnes souvent masquées (par un masque chirurgical au début) pour préserver leur identité a été jugée inconstitutionnelle. L'ensemble des personnes arrêtés ou malmenées par la police au motif qu'elles portaient un masque peuvent être soulagées. Ce que cela dit quand même c'est que le pouvoir exécutif ne se soucie pas tellement de la règle de droit malgré ses dires. Bon, ça on le savait mais c'est quand même autre chose si les juges (qui sont d'ailleurs, même si c'est assez discrètement, des soutiens du mouvement démaré sur la perspective d'une remise en cause de l'autonomie judiciaire de Hong Kong), le disent clairement. Bref, le mécontentement pourrait se renforcer.
Le bureau des affaires scolaires vient d'annoncer que les écoles (maternelles, primaires et secondaires) resteraient fermées demain mais qu'elles doivent se préparer à la réouverture mercredi. Hum, je ne suis pas sure d'y croire. Le lycée français vient d'annoncer que les maternelles resteraient fermées toute la semaine. Voilà, je suis restée à la maison toute la journée après la séance de devoirs (2 adultes pour 3 enfants c'est rude). Pour avoir une minute à moi (et faire ce blog) je viens quand même d'envoyer mes enfants sur l'île de Hong Kong en MTR pour leur cours de roller, ils vont prendre une autre ligne vue que les stations de ligne nord sud ) côté de chez nous sont en train de fermer. Depuis vendredi 15 novembre, Hong Kong est étrangement calme. Les étudiants de CUHK qui attendaient être pris d'assaut ont finalement, semble-t-il, quitté les lieux pour se positionner plus près du centre ville, dans l'enceinte de Polytechnic University, juste au niveau du cross-harbour tunnel de central qui est donc bloqué. C'est donc un nouveau siège qui a commencé, mais avec les policiers relativement en retrait. Samedi on est même allé à Central, relativement désert pour faire une ballade sur les hauteurs de Happy Valley (les champs de course). On a commencé notre visite par le musée de la police, ce qui ne manque pas de piquant vu le haut niveau d'insatisfaction que la police a atteint ces derniers temps pour leur gestion catastrophique des affrontements : tirs de lacrymo et de balles en plastiques directs sur les têtes, tirs sur les journalistes, tirs à balles réelles et arrestations d'à peu près n'importe qui, insultes et j'en passe... le tout repris en boucle sur le twitter et j'imagine les télés. En tout cas pas sur les télé du métro qui ne montrent que les mésactions (hélas de plus en plus fréquentes des protestataires). On s'est ensuite baladé sur les chemins bétonnés en pleine forêt à 2 minutes des quartiers centraux. Dimanche, le grand tournoi de rugby auquel devaient participer les enfants étant annulé, on a fait une vraie rando, avec piquenique autour du Mount Butler. Et bien, il se mérite ce sacré mont ! Alors que les enfants courraient devant les 4 adultes ont souffert. On est arrivé bien cramoisi en haut. Mais la vue sur les réservoirs, c'est franchement beau. La redescente était plus agréable, avec une arrivée au niveau de Quarry Bay pour apprendre que l'école (que dis-je : toutes les écoles de HK) restaient fermées demain lundi. Toute l'après midi du dimanche, les heurts se sont multipliés sur le campus de Polytechnic University. La police y teste même une nouvelle arme, les canons sonores (LRAD, Long Range Acoustic Device), qui lancent des cris stridents pour abrutir les adversaires. Les critiques pleuvent, car ce n'est visiblement pas utilisé ailleurs en raison des problèmes que ce système peut poser. Cela s'ajoute aux canons à eau, critiqués pour inclure des produits détergents qui brulent la peau, et des gaz lacrymo faits en Chine qui seraient ultra-toxiques. Comme Polytechnic University est proche de chez nous, ce n'est pas très réjouissant. Les niveaux de toxines seraient apparemment vraiment dangereux. Pas sur que mon dépollueur traite cela. Surtout qu'aucune sortie de crise en vue... le gouvernement est muet et si les protestataires - j'imagine - sont de moins en moins nombreux car le risque d'être blessé est de plus en plus réel, rien n'est offert pour leur permettre une sortie honorable. Bref, il suffit d'un mort pour que tout parte à nouveau en spirale. Surtout qu'aucune sortie de crise en vue... le gouvernement est mué et si les protestataires j'imagine sont de moins en moins nombreux car leur risque d'être blessé est réel, rien n'est offert pour leur permettre une sortie honorable. Bref, il suffit d'un mort pour que tout parte à nouveau en spirale.
Les enfants sont eux très contents, au lieu de l'école leur planning est rempli de playdate avec les copains, séance de badminton et cours de roller. Bref, la belle vie. Pour Matthieu et moi il y a l'espoir de retourner au bureau même si on a été informé que le semestre était terminé pour les étudiants. Plus de cours en classe, les enseignants doivent organiser un enseignement par internet. J'ai donc mis les slides de cours en ligne et mis des quiz pour aider l'apprentissage. Ce qui s'annonce un peu plus compliqué c'est la validation des acquis comme on dit car les examens finaux ont été annulés. J'ai mis donc une espèce d'analyse de texte mais j'ai l'impression que de nombreux étudiants n'ont plus la tête à cela. Je peux regarder sur le site dédié au cours à quelle date ils ont consulté les supports de cours et pour une bonne moitié ne s'est pas logué depuis un mois. Bref, ce n'est pas gagné. Ce jeudi, toutes les écoles et universités de HK sont fermées. Certaines facultés, Chinese University, (CUHK) et Baptist University ont indiquées qu'elles fermaient pour le semestre, il ne reste en fait que 3 semaines de cours. Elles organiseront les examens en ligne. On en est pas encore là pour Lingnan University, qui est assez en périphérie et encore indemne des heurts entre étudiants et policiers. Le campus est fermé pour la semaine, on verra ce qui se passe ce week end. J'alterne en optimisme et pessimisme, ne sachant pas trop si une fermeture du campus jusqu'à Noël tombe dans la première ou deuxième catégorie. Il est vrai que la situation est dramatique sur certains campus, dont Chinese University, où les étudiants ont construits des fortifications pour empêcher les policiers de rentrer. Des étudiants chinois (mainland) ont été exfiltrés par bus et bateau et mis à l'abri de l'autre côté de la frontière, à Shenzhen. Finalement ce n'est pas tant le côté boulot qui m'embête le plus, c'est pas affreux de ne pas faire cours. C'est le côté école des enfants. Les manifestants bloquent les routes et les tunnels et jettent des pavés des passages aériens de manière de plus en plus anarchique... y compris sur les gens qui essayent juste d'aller au travail. On est loin de l'esprit pacifique du début. Par désespoir des dizaines de manifestants utilisent maintenant essence et feu de manière chaotique sur ce qui les énervent: voiture, magasin et personne du camp inverse. Il est bien possible que d'une majorité silencieuse en faveur des manifestants et outrés par les violences policières, on aboutisse à une majorité silencieuse renvoyant dos à dos manifestants et policiers. Les élections (pour les comités de quartiers, donc chargés des problèmes comme les poubelles et les fêtes de quartier) sont prévues le 24 novembre, dans 10 jours. Même si techniquement cela ne compte en rien pour la gestion politique du territoire, cela peut être signal fort de l'opinion des gens... mais encore faut-il qu'elles se tiennent. Si elles ne se tiennent pas cela risque d'être vu comme le dernier coup aux lambeaux de démocratie qui restent... On est dans une impasse.
Lundi 11 novembre après la fermeture anticipée du lycée, les enfants ont pris le bus à 12h pour arriver à 14h. Pas mal de bouchons donc mais l'ambiance était bonne malgré le raté sur les snacks initialement prévus. Les enfants sont arrivés affamés. Matthieu et moi étions restés à la maison et avons pu voir les expats rentrer eux aussi en anticipé ainsi que les nombreux bus scolaires. La situation n'est pas désespérée, les lieux d'affrontement sont assez limités, il faut juste éviter d'être d'un côté avec son le lieu de travail ou l'école de l'autre Or c'est juste notre problème: le campus de TKO à l'est de kowloon et nous à l'ouest, de sorte que le bus scolaire doit passer près de Hung Hom où est le tunnel qui traverse vers l'ile de Hong Kong, point stratégique pour bloquer le lien et près de TKO où les heurts sont réguliers dans le centre commercial Pop Corn. La station de métro de TKO est très régulièrement fermée ces derniers temps. Bref, hier le campus de TKO du LFI est donc resté fermé, contrairement aux autres campus qui sont dans les montages sur l'île. On a gardé les enfants car notre université était fermée aussi. C'était donc le mardi 12 novembre. Ils sont allés chez des copains dans une résidence toute proche, au programme piscine et badmington. Pas trop à plaindre. Hier soir s'annonçait le retour à la normal: la faculté réouvrait et l'école aussi. Et puis ca s'est dégradé, avec les heurts qui se sont multipliés cette nuit sur le campus de Chinese University, au nord, là où Matthieu travaillait la première année où on est arrivé, il semble que les autres universités, y compris la notre, ait réévalué la situation. A 23h30, message de Lingnan pour nous dire que le campus resterait fermé. Mes premiers cours annulés de l'année!! On est à 3 semaines des examens et les sujets d'examen ont déjà été imprimés, petite galère en perspective, il va falloir que je donne les solutions aux étudiants sur la partie non couverte. Ce matin, mercredi 13/11, au moment du réveil (à 6h40) le groupe whatsapp, disons les 3 groupes, un pour chaque enfant, a commencé à s'activer. J'avais à peine secoué les garçons qui faisaient semblant de ne pas se lever qu'un message informait que le principal avait finalement décidé de garder le site de TKO fermé!! Les garçons ont ni une ni deux sauté de leur lit pour faire la fête du petit sioux. Ah ça pour être en forme quand il n'y a pas école ils sont forts. Bref, encore une journée à les occuper... on a donc reprogrammé piscine et badmington cette fois ci chez nous, il va falloir Matthieu et moi nous exfiltrer... Un petit apercu de la situation "MTR" ce matin à 10h, pour idée notre bureau est à Siu Hong (coin haut à gauche) et l'école des enfants est à Tseung Kwan O (à droite). Normalement les manifestations et heurts entre jeunes et policiers se concentrent le week-end. C'est une des raisons qui nous poussent ces derniers temps à privilégier rando et plage et à éviter les centres commerciaux et les zones urbaines. Mais ce matin, lundi 11/11 changement de braquet des étudiants et appel à la grève générale avec des annonces de blocage de route dès 7h du matin. Les enfants ont pris le bus normalement à 7h20 et moi je me suis mise en route pour le bureau en métro. Trois stations plus tard, métro à l'arrêt. Je me dis que je vais pas m'entêter ... sur twitter circulaient déjà des videos de policiers tirant à balles réelles sur des jeunes en noir et un motard de la police fonçant exprès sur les foules. Bien m'en a pris. Après 20 minutes d'attente j'ai réussi à prendre un métro dans l'autre sens et retrouver Matthieu à la maison qui n'avait pas bougé. Ma messagerie m'annoncait en vrac qu'il n'y avait plus de MTR pour aller à la faculté, que la faculté était fermée (les accès ascenseurs et escaliers des batiments ont été bloqués par du mobilier) et que le lycée français fermait plus tôt. Les enfants vont sans doute passer un peu de temps dans le bus, mais des snacks sont prévus car le tunnel principal entre chez nous et l'école est bloqué.
A priori deux jeunes manifestants sont entre la vie et la mort après avoir été visés à bout portant par un policier qui a pris peur après leur avoir sauté dessus sans trop de raison. Les slogans de plus en plus radicaux se multiplient... du "add oil" des débuts on est passé à "revenge" and "give me democracy or give me death". Ca n'augure rien de bon. C'est un des grands classiques Hongkongais et, forcément, il fallait bien qu’on se décide à aller cocher cette case avant de s’en aller. Pour rappel, le territoire de Hong Kong est très peu urbanisé. Moins de 70% de la surface est construite. Cela fait que les gens s’entassent sur très peu d’espace et ça donne son caractère unique à la géographie de Hong Kong : une juxtaposition de lieux hyper-denses et de nature sauvage. Enfin, les Hongkongais disent « sauvage », mais c’est pas si sauvage que ça. C’est de la nature, du vert, mais ça reste très entretenu. Il y a par exemple beaucoup de sentiers de randonnées, mais ils sont presque tous bétonnés. Toujours est-il que la nature fait partie intégrante de la vie et de la culture hongkongaise et que, même si trainer dans des centres commerciaux reste l’activité dominicale principale, beaucoup profitent de ces espaces vierges de constructions. La mer : la plage, les sorties en bateaux, la pêche, les entrainements de dragon boat… Et la montagne : des randonnées en tous sens, plus ou moins ardues, et plus ou moins sportives. Ca va de la marche tranquille sur une route pédestre en promenant un petit chien dans une poussette (les chiens, c’est connu, ne doivent pas poser une patte par terre : c’est sale), au truc de monomaniaque où il s’agit d’enchainer les chemin de crête en courant. Mais dans tous les cas, les hongkongais sont généralement super équipés et quand ils font de la randonnée, c’est souvent couvert de micro-fibres fluo, avec des bâtons de marche et les chaussures derniers cri. Tout ça pour dire qu’aller marcher est une des activités les plus agréables à pratiquer ici. Les paysages sont vraiment beaux et quand la température le permet (de Novembre à Mars), on passe toujours des moments très agréables et très dépaysants. On a sillonné dans pas mal d’endroits, mais ce qui nous manquait encore, c’est d’aller camper. Le grand classique évoqué ci-dessus, c’est en effet d’aller planter sa tente sur une plage pour profiter d’une nuit au grand air. Aller dormir sur la plage lorsqu’on est locataire dans la ville à l’immobilier le plus cher du monde, ça peut sembler passablement tordu. Mais c’est quand même un bon moyen de se changer les idées. La plage de Sai Wan (du côté de Sai Kung, au Nord-Est de Hong Kong) est l’un des bons spots pour ça : c’est du camping sauvage (sur la plage), mais tout de même sur une zone où cette activité est officiellement autorisée, et où l’on trouve non loin un petit restau qui permet de se nourrir sans avoir à trimbaler des vivres pour une famille nombreuse. La plage, de nuit et au petit matinOn y est allé ce week-end avec une autre famille. Bien sûr, il a fallu s’équiper. Le restau de la plage propose des tentes à la location, mais pour le tiers du prix du neuf. On a donc investi en se disant que c’est - sans nul doute possible - le début de très nombreuses aventures au grand air. On est alors partis, chargés comme des Dupont-Dupond, avec nos sacs remplis de tentes et de tapis de sols dont les étiquettes décathlon pendouillaient encore.
En réalité, on a fait au plus simple, en limitant la marche au minimum. Mais c’est en partie la faute de l’autre famille. Le père est fan de surf, et il trimbalait un matériel impressionnant interdisant toute randonnée un tant soit peu ambitieuse. Départ de Sai Kung, en taxi, jusqu’à un col, et une redescende tranquille vers la plage en 3 petits quarts d’heure. On a cherché un coin à l’abris du vent pour planter nos piquets. Ensuite, glandouille sur la plage, diner au restau le soir (l’incontournable duo riz sauté / nouilles sautées), et l'indispensable veillée autour d'un feu de bois . Ensuite, au dodo : une tente pour les enfants, l’autre pour les parents. Dormir sur la plage, c’est bruyant, mais ça ne nous a pas empêchés de passer une bonne nuit. Le lendemain matin, les enfants ont loué des planches de surf et des body board pour jouer dans les vagues (assez mahousses). L’ainé de l’autre famille se débrouille bien en surf, et a pris Pierre sur sa planche. Quand à Avril et Ulysse, ma foi, ils ont réussi à prendre quelques vagues tous seuls. Ca reste du petit surf dans la mousse, mais c’est quand même pas mal pour des débutants. On a ensuite plié nos affaires et à l’heure du déjeuner, bonne surprise : le restaurateur nous a annoncé qu’il allait y avoir des bateaux pour rentrer. Normalement, les week ends, des petites vedettes d’une vingtaine de places viennent s’échouer sur la plage pour ramener les gens à Sai Kung. C’est super pratique, ça fait une très jolie balade en bateau, et comme les gars foncent à toute berzingue, c’est mieux que n’importe quel manège pour faire hurler de plaisir les enfants (et faire grincer les lombaires des parents). Vu l’état de la mer, on s’attendait à ce qu’il n’y ait pas de bateau ce week end. On se préparait donc à devoir remonter à pied (ce qui n’était pas bien grave en soi), puis à devoir se dégoter un taxi pour redescendre vers Sai Kung (c’est plus chaud). Mais les vagues s’étant calmées dès le dimanche midi, on est finalement rentrés en bateau, puis en taxi jusque chez nous. On a ramené des tonnes de sable dans nos bagages, des enfants épuisés et sentant le feu de bois, et de bons gros coups de soleil. Surtout, on est revenus avec l’impression d’être partis bien longtemps et bien loin. Maintenant qu’on est équipés et qu’on a acquis un statut de vétérans, nul doute qu’on va tenter de remettre ça avant notre départ. Vacances de la Toussain obligent, on est (encore !) partis en voyage. Après une bien belle petite semaine à Kyoto il y a pile un an, cette fois c'était Tokyo, pour 6 jours. Et 6 jours, ce n'est pas de trop : on est rentrés les pieds endoloris, mais un peu frustrés de repartir si tôt. Il faut dire que la ville est grande, qu'il y a beaucoup à faire et qu'aller d'un point à un autre prend pas mal de temps : un moment pour trouver la bonne entrée de métro, un autre pour comprendre quelle ligne prendre et combien payer, un long voyage, et enfin beaucoup de temps perdu à chercher la bonne sortie puis à retrouver son chemin une fois qu'on a compris qu'on s'était trompés. Comme d'habitude (et même avec un talent toujours en progrès), Sandra a tenu un planning serré et bien dense. Impossible donc de tout raconter... d'autant que je me suis complètement laissé porter en laissant Sandra donner des indications, le nez collé à son guide et son téléphone, si bien que, tout comme les enfants, je n'ai jamais su dans quelle direction nous allions et dans quel quartier nous nous trouvions. Alors, en vrac, voilà grosso modo, ce qu'on a fait : - On a visité des musées. Le musée national, dans un grand parc : des estampes, des tissus, des peintures, des tenues de samouraïs... et quelques salles un peu absconses consacrées aux lames de sabres (oui, oui, juste des lames de métal finement aiguisées dont les différences subtiles dépassaient de loin nos capacités d'observation). Le musée d'Edo-Tokyo, dans un grand bâtiment moderne où l'on trouve des maquettes de la ville à l'époque Edo (XVIIe siècle) et des reconstitutions de maisons. Grace à notre guide, gratuite et en français, on y a appris quelques petites choses comme la façon de laver les kimonos (il faut découdre les 7 pièces de tissus qui le composent, les laver séparément, puis recoudre) ou celle de produire des estampes (il faut créer autant de tampon encreur en bois qu'il y a de couleur). Le "TeamLab Borderless". Pour y aller, il faut prendre une ligne de métro spéciale qui nous offre une vue sympa sur la zone portuaire. Le musée est en fait un grand hangar où l'on circule dans un dédale de salles obscures où sont projetées des formes colorées sur les murs, un peu comme dans les carrières de lumières des Baux-de-Provence. C'est très ludique et certaines salles sont vraiment très réussies. - On a mangé. On a commencé d'emblée par un restaurant très classique près du musée national. On mange assis sur des tatamis, bien sûr. Les enfants ont eu droit à une série de plats avec petites saucisses découpées en forme de pieuvres, riz moulé en forme de panda, etc. Et les grands se sont engagé dans un menu gastronomique composé d'une succession sans fin de plats divers, tempuras, soupes, hot pot, etc. On a passé une soirée au Gonpachi, le restaurant avec son étage en mezzanine qui aurait inspiré à Tarantino la célèbre bataille au sabre de Kill Bill (il y avait en prime un spectacle de tambours... histoire d'ajouter encore un peu à l'assourdissante ambiance sonore). On a aussi fréquenté pas mal de petits restaurants très spécialisés : omelettes cuites sur une plaque incrustée dans la table, nouilles, tempuras, sushis... Et puis, bien sûr un peu de street food et notamment les crèpes généreusement fourrées de tout ce qu'on peu imaginer voir baigner dans la chantilly. - On a expérimenté les arts martiaux. Un matin, on a passé une heure dans un petit appartement transformé en dojo où il nous a été enseigné le maniement du katana, l'art du lancer de shuriken et autres astuces de Ninja. La bonne humeur énergique de notre instructeur suffisait à faire oublier le côté cheap de cette affaire et on s'est bien amusé. Ce n'était pas la saison des combats de sumos malheureusement. Mais on a quand même eu la chance de pouvoir cocher cette case indispensable. D'abord en tombant par hasard sur deux jeunes Sumos en kimonos qui attendaient tranquillement leur taxi et, un peu plus loin, sur une démonstration de combat par deux (toujours bien gros) jeunes retraités. On a fait du shopping. Comment aller à Tokyo sans faire un tour au Pokemon center pour y faire le plein de cartes ? Nos enfants, l'an dernier, avaient fait un peu la moue devant les cartes toutes en japonais. Cette année, cela ne leur posait plus de problème. Non pas qu'ils aient appris les rudiment de l'écriture nippone, mais ils ont progressé en compréhension du monde des cartes Pokemon et savent maintenant les reconnaitre dans avoir besoin de les déchiffrer (du moins, c'est ce qu'ils prétendent). On a fait ça, bien sûr, dans les premiers jours pour avoir de quoi les occuper en les plongeant dans des marchandages sans fin (c'est bien connu, les cartes de l'autre sont forcément mieux que les siennes). On a continué dans la pop culture en visitant quelques librairies consacrées au mangas. Impressionnant. Dans des immeubles de 3 ou 4 étages, des salles remplies jusqu'au plafond d'étagères alignant des petits mangas. C'est bien organisé : les mangas pour garçons (monstres sanguignolants et collégiennes coquines) sont au 2e, les mangas pour filles (jolis garçons bien peignés, fleurs colorées et porno-soft gay) sont au 3e, etc. En revanche, le rayon des mangas en anglais est - au mieux ! - limité à une maigre étagère dans un petit coin. On a quand même acheté quelques exemplaires, ce qui a occupé les deux grands dans le métro (mais je crois qu'ils n'ont pas tout compris). On a aussi investi dans des tabi-shoes (et donc, forcément dans des tabi-socks) : ces chaussures de ninja en toile qui laissent le gros orteil séparé des autres. Seuls Sandra - qui trouvait cela trop inconfortable - et Pierre - qui n'accepte de porter qu'un nombre extrêmement limité de vêtements - n'ont pas succombé. - On s'est lavé. Les fesses très souvent en profitant des fameuses "washlet" japonaises dont les enfants ne se lassent pas. Mais aussi tout le reste, dans un bain public. On s'est rendu au Odaiba Ōedo-Onsen-monogatari, assez moderne et qui vise sans doute la clientèle des hommes d'affaire à la sortie des bureaux. On entre, on paie, on reçoit un yukata (un petit kimono simple) qu'on va enfiler. Une fois en tenue, hommes et femmes peuvent se retrouver dans un espace où l'on trouve quelques restaurants et jeux pour enfants (c'est rigolo car tout le monde est en robe fleurie et pieds nus). Ensuite, chacun peut aller au bain. Hommes et femmes sont séparés car tout le monde est tout nu. On entre dans une grande salle et on commence par se laver dans un coin dédié à cela en s'aspergeant, assis sur des tabourets. Puis on peut passer dans différents bains. Des très chauds, en extérieur (c'est sympa car ce jour-là il tombait une petite pluie froide et on était bien à faire trempette dans l'eau fumante). Des moins chauds en intérieur, avec des petites bulles, des grosses bulles, un peu de sel... et on finit dans l'eau glacée. On a tenté de profiter de la coupe du monde de rugby (c'est notre grande passion familiale du moment !). C'était pas si facile. Pas de fan zone en plein air et assez peu de bars retransmettant les matchs. On a tenté quelques pubs pour voir LE quart de finale Angleterre vs Blacks, mais c'était peine perdue : les pubs sont tout petits et les nombreux supporteurs de rugby qui sillonnaient la ville sont bien gros. On a aussi essayé d'acheter des maillots. Pas facile non plus. Il y avait bien, sous un chapiteau, une immense boutique vendant les produits officiels. Mais en cette fin de tournois, il ne restait plus grand chose. Plus de maillots nippons, ni français, ni anglais,... ni rien ou presque, sauf à être un supporteur des Tonga s'habillant en XXXL (oui, 3X, j'imagine qu'on ne voit ça que dans les boutiques de rugby). - On a trainé avec nos amis belges. Il y a forcément un truc là-dessous : sans se concerter, ça fait déjà la troisième fois qu'on tombe sur eux pendant nos vacances (Kuala Lumpur, Rangoon, Tokyo). C'est bien parce qu'ils sont sympas et que nos enfants s'entendent bien avec les leurs. - On a fait du kayak... oui oui, du kayak, de nuit sur l'un des canaux de la ville. C'était super. Bien organisé avec un guide qui nous a appris les rudiments de la navigation. On avait deux kayaks doubles (Sandra avec Ulysse et Pierre avec moi), et un simple pour Avril. Elle appréhendait un peu, mais elle s'en est très bien tirée (et au moins, elle n'avait pas Pierre devant elle pour donner des coups de pagaie dans tous les sens et l'arroser copieusement). La balade n'avait pas de charme excessif, mais tout de même une belle vue sur la Tokyo SkyTree illuminée, et un très bon moment à profiter d'un calme étonnant au milieu de la ville. -On a visité des temples, les plus connus le Senso Ji et le Meiji Ji mais des plus petits et parfois plus beau encore comme le Hie-Jinja Shrine et ces multiples portes Torii. - On est allé dans un rabbit et otter café. Dans un petit box, on pouvait nourrir et faire mumuse avec une famille de lapins puis une famille de loutres. 30 minutes de gloussements d'enfants garantis. Après il a fallu batailler pour ne pas aller dans les multiples variantes avec des chouettes, des hérissons ou des chats (on avait déjà fait à Hong Kong). - Et puis on a flâné dans les rues, les boutiques, le métro. Tokyo, c'est pas vraiment beau, mais on se sent bien dans cette succession de rues soit frénétiques soit totalement désertes et silencieuses, dans ce mélange entre pop culture clinquante et traditions corsetées au calme millimétré. Hop, un diaporama : Figurez-vous que le 7 octobre, c'était le 9e jours du 9e mois lunaire. Ce double neuf est l'une des deux dates du calendrier chinois dédiée à la célébration des morts et le jour est donc férié à Hong Kong (c'est le Chung Yeung festival). Comme ça tombait un lundi, il fallait occuper ce grand week-end et nous sommes partis à Zhuhai. Zhuhai, c'est en Chine, juste à coté de Macao, donc pas bien loin de Hong Kong. Le voyage en lui-même était l'une des attractions à notre menu. Nous sommes revenus en ferry (une petite heure de bateau), mais à l'aller, nous avions prévu d'emprunter le fameux pont Hong Kong-Macao-Zhuhai. Ce pont qui relie les trois villes est un élément clé de la politique d'intégration du delta de rivière des perles (la "Great Bay Area Initiative"), qui englobe notamment Hong Kong, Macao, Canton et Shenzhen. Cette initiative d'intégration correspond à des objectifs économiques évidents, mais aussi, bien sûr, à des perspectives politiques. L'idée est de développer les interdépendances économiques pour créer des synergies et pour effacer progressivement les frontières entre la Chine continentale et Hong Kong. Tout cela fait sens, a priori, mais il va de soit que les Hongkongais les plus hostiles à Pékin ont vu d'un très mauvais oeil la construction de ce pont géant. Il faut dire qu'ils n'ont pas que des mauvais arguments tant on a du mal à voir comment cet ouvrage hors de prix (près de 19 milliards de dollars US) peut être vraiment utile et profitable. S'il a coûté si cher, c'est que c'est un pont en pleine mer (le plus long du monde, forcément !) et a dû être conçu pour résister aux typhons. Mais aussi parce que ce n'est pas qu'un pont. C'est aussi un tunnel : la partie du milieu plonge sous terre pour (j'imagine) laisser un passage libre pour les cargos. Cette fantaisie a nécessité la création de deux iles artificielles pour installer les bouches d'entrée et de sortie. Sur tout cela, on aurait pu imaginer voir circuler un train qui, par exemple, aurait pu se connecter au métro de Hong Kong et à la gare de trains rapides vers la Chine. Mais pas du tout : c'est juste un pont routier. Pire, ce n'est pas une simple autoroute : seuls deux compagnies d'autobus et quelques véhicules privés dûment accrédités ont le droit d'emprunter ce pont. En fait, pour traverser, on doit d'abord prendre un bus spécial à Hong Kong. Celui-ci nous amène dans un terminal tout neuf, construit à côté de l'aéroport. On passe la douane hongkongaise et on embarque, en zone "internationale", dans un autre bus spécial qui fait des aller-retours sur le pont. On arrive ensuite à Zhuhai, dans un autre terminal, où l'on passe la douane chinoise... Question intégration et effacement des frontières, il y a encore un peu de boulot. Tout le processus n'est pas plus flexible et à peine plus rapide que les bons vieux ferries. Dans notre cas, c'était encore pire car on devait prendre notre premier bus dans la gare routière située sous le centre commercial à côté de chez nous. Manque de pot, ce samedi là, le centre commercial était fermé comme tous les malls de Hong Kong suite aux manifestations plutôt chaudes de la veille au soir (ce samedi signait le début d'un couvre feu larvé à Hong Kong avec fermetures sporadiques des malls et arrêt du métro dès 22h, voire 20h). Finalement, on s'est retrouvé dans un de ces mini-bus typiques de hong kong (rouges ou verts, mais uniformément délabrés) pour rejoindre une autre gare routière où l'on a pu retrouver notre bus. Et tout ça pour quoi ? Ma foi, pour pas grand chose, sinon un week end en Chine, assez paisible et tout sauf désagréable. Notre première étape était le cluster de boutiques de meubles. C'est une spécialité de Zhuhai : des fabricants y ont des boutiques pour proposer leurs dernières créations. On y trouve des hangars remplis de ces fameux meubles chinois en bois super massif et très verni, avec des accoudoirs énormes et de gros coussins (si si, vous savez, ces coussins que leurs heureux propriétaires conservent souvent sous des housses en plastique transparent). Il y a aussi ces tables basses munies d'une plaque spéciale pour y servir le thé et qui sont équipées d'une série de trous et de clapets nécessaires pour faire passer les fils électriques de la bouilloire et évacuer l'eau qu'on ne doit pas manquer de renverser partout et généreusement en préparant le précieux nectar. Mais il n'y a pas que ça. Il y a aussi des hangars remplis d'un fatras de meubles anciens et tout poussiéreux, des magasins de fausses antiquités au catalogue fourni (et qui se font fort de vous fabriquer vite fait la commode chinoise de vos rêves, aux couleurs et dimensions de vos choix), et puis des fabricants de jolis meubles en bois clair, aux lignes pures et légères du design scandinave mais avec des inspirations chinoises... Tout cela, à des prix chinois qui, quand on vient de Hong Kong, nous font paraître tellement riches. Chez nous, à Hong Kong, on n'a pas vraiment la place pour tout ça. Et pour notre (si tout va bien) future maison de Sceaux, on a un peu de mal à savoir ce dont on aura besoin. Pour autant, on ne pouvait pas ne rien acheter. Alors on a jeté notre dévolu sur un Pixiu (貔貅). Mais si, vous savez, c'est cette bestiole mi-lion mi-dragon qui trône souvent à l'entrée des temples, mausolées et maisons. Attention à ne pas le confondre avec les lions qu'on trouve, toujours par paire, de chaque côté des portes, avec leurs pa-pattes posées sur une bou-boule. Un Pixiu, c'est pas pareil. Les paires de lions sont de vrais lions, et ils sont là pour montrer la puissance et protéger les lieux contre les vilains. Le pixiu n'est ni un lion, ni un dragon : c'est un pixiu ! Il est généralement tout seul, assez petit, et se trouve sous forme de pendentif ou de petite statue, souvent perchée en haut d'une colonne. Son job n'est pas de vous protéger. Il a toujours la gueule ouverte car sa raison d'être est d'absorber (au bénéfice de son heureux propriétaire) la bonne fortune... et la fortune tout court : il se nourrit d'or et d'argent qu'il emporte dans la maison (du coup, il faut le poser dos à la maison, la gueule vers l'extérieur pour faire entrer l'or, sinon, il va prendre les richesses de la maison pour les envoyer vers l'extérieur, ce qui serait tout de même ballot). Bref, un pixiu, c'est un must have pour quiconque a un minimum d'ambition. Le nôtre est en pierre et trône en haut d'un pilier carré d'1m30 environs. Vu le poids du machin, nul doute qu'il est destiné à ceux qui ont un paquet d'ambition ! Bref, c'est le nain de jardin qu'il nous fallait absolument. Il nous a été vite livré à domicile et trône maintenant dans notre salon. On voit bien qu'il piaffe d'impatience à l'idée de trouver sa place et se mettre au boulot dans son jardin de banlieue. Une fois cette affaire essentielle réglée, on a pu consacrer le reste du week end à des choses plus futiles. Le lendemain, nous avons donc visité la ville, encore toute pavoisée de drapeaux chinois, résidus de l'anniversaire des 70 ans de la république populaire. L'un des gros highlights, c'est l'opéra tout neuf avec ses cymbales (coquillages? oreilles?) blanches, plantées au bout d'une petite presqu'île. L'intérieur est tout ce qu'il y a de décevant, mais de l'extérieur, c'est vraiment réussi. Comme on était là, on s'est offert une course échevelée (bien qu'au ralenti) en rosalie tout autour de la presqu'île. On s'est ensuite infligé une visite à la grande statue de la fille du pêcheur qui est le symbole de ville. La statue est sans intérêt, mais la grande plage devant la ville est jolie. En face, il y a un grand parc où les adultes ont pris un apéro pendant que les enfants jouaient au foot avec une noix de coco (c'est pas cher et ça les a bien occupé). Le lendemain était consacré à la visite de la copie du palais d'été de Pékin. C'est un grand classique, en Chine, de faire des copies en béton des grands monuments. Après tout, pourquoi pas. Comme le vrai palais, celui-ci est posé à coté d'un grand lac artificiel où l'on peut naviguer à sa guise en louant des bateaux à propulsion électrique (on a fait ad nauseam de ce genre de pédalo à moteur à Shanghai et Pékin quand les enfants étaient petits, et on en a refait avec un certain plaisir nostalgique). Bonne surprise, le parc entourant le palais accueillait aussi un parc aquatique avec piscines à vagues et toboggans en spirale. La déco était entièrement dédiée à l'Egypte antique (après tout, pourquoi pas - bis) et le tout était un peu décrépit et vaguement crado. Mais rien qui ne puisse tempérer l'enthousiasme des enfants qui s'y sont épuisés pendant 3 heures. Il nous restait plus qu'à nous coucher après avoir mangé vite fait dans un micro restaurant du Xinjiang où les enfants ont été enchantés de voir le gars fabriquer ses nouilles à renfort de grands gestes. Pour le dernier jour, on a fait court, parce que, ma foi, on commençait à avoir écumé les principaux charmes de la ville. On a traversé toute la ville (c'est long) pour voir un musée en plein air consacré aux portes. Oui oui, aux portes. C'est un grand parc avec des reproductions à taille réelle de différents types de portes et arches monumentales qu'on trouve en Chine. Après tout, pourquoi pas - ter. Le principal attrait est de pouvoir dire qu'on a visité un musée de la porte, ce qui, sait-on jamais, pourra peut être nous servir un jour pour briller en société. On a tué notre dernière heure sur la plage, près du phare en toc, et d'un coup de ferry on est rentré à Hong Kong. Avril a participé l'année dernière un processus de sélection au sein du Lycée Français qui constituait une équipe mixte de rugby pour un tournoi programmé à Tokyo le week end dernier. Avril qui n'avait jamais fait de rugby a plutôt bien tiré son épingle du jeu. Il fallait 5 filles dans l'équipe et seules 4 des candidates en faisaient en club. Restait donc une place à prendre. Avril a fini première sur la liste d'attente car le coach a préféré Iluh, une très bonne copine d'Avril, plus accrocheuse et sans état d'âme pour faire des plaquages. Mais la famille d'Iluh a renoncé en apprenant le prix du séjour au Japon. La voie était donc libre pour Avril qui depuis s'est trouvé une passion pour le rugby. Elle, comme ses frères, a rejoint l'équipe des Tigers. Entrainement tous les dimanches matins. Avril faisait en plus l'entraînement avec l'équipe du LFI. Ils ont été dotés de nouveaux maillots aux couleurs d'un sponsor (j'imagine un parent d'élève Paul Y(?), c'est une boite d'ingénieurs). Le coach est quand même un ancien joueur de rugby professionnel Khrist KOPETZKY, et l'équipe a franchement du potentiel. Au fil des entrainements, Avril prenait confiance, se permettait de plaquer les garçons... Se rendait compte qu'elle était grande et que les joueurs en face cherchait à l'éviter... Bref, une évolution sympathique. Avril trépignait d'impatience de partir au Japon. Elle avait fini sa valise le lundi soir, alors que le départ était vendredi matin. Trop hâte de voir les rugbyman français en vrai car elle allait assister au match France-Angleterre..... Si vous suivez le rugby vous connaissez la suite.. Patatras, le typhon Hagibis qui a quand même fait 40 morts au Japon, a eu raison du match France-Angleterre et aussi du tournoi organisé par le LFI de Tokyo.
Jeudi matin on a été informé que les 16 équipes participantes étaient priées de rester chez elles. A priori certaines, celles qui venaient d'Europe étaient déjà dans l'avion. Les pauvres enfants, après leurs 12h d'avion ont a priori été remis dans l'avion dans l'autre sens à leur arrivée. Finalement on s'en sort plutôt bien. Bon on ne sait pas si il nous faudra quand même payer quelque chose... C'est l'école qui avait géré la réservation, on attend la note. Bref, Avril a été bien triste. Bon la vie continue.... le rugby chez les Tigers. Et puis Tokyo, on y va en famille dans 10 jours... En 1841, Charles Elliot a choisi une petite ile rocheuse, située non loin du territoire portugais de Macao, pour implanter la colonie Britannique en Chine. Ce faisant, il a désobéi aux instructions de lord Palmerston, le secrétaire aux affaires étrangères de la reine Victoria. Celui-ci voulait s'implanter dans les iles de Zhoushan, c'est-à-dire bien plus au Nord (en face de Ningbo, au sud de Shanghai). Le choix de Charles Elliot était celui d'un militaire (il se doutait qu'il était préférable, pour plus de tranquillité, d'éviter la provocation en s'implantant loin de Pékin). C'était aussi celui d'un marin. Le but de cette petite colonie était d'avoir un comptoir sous autorité britannique pour servir de base arrière pour les grandes compagnies commerciales anglaises (en gros : exporter de l'opium et n'importe quoi d'autre vers la Chine, importer des coolies chinois qui vont aller travailler dans les plantations et les chantiers de construction en Amérique et aux caraïbes, et servir de chantier naval et d'entrepôt pour le commerce en transit entre les Indes et tout l'Extrême Orient). Pour les marins, ce petit territoire excentré avait un atout essentiel : c'est un ensemble d'iles montagneuses qui plongent à pic dans la mer et offrent donc un grand nombre d'abris naturels en eaux profondes : l'endroit parfait pour un port. C'est ainsi que fut créé ce lieu entièrement dédié au capitalisme décomplexé et au commerce maritime. Il fût baptisé Hong Kong, soit littéralement, le port parfumé : 香 (parfum) et 港 (port). Tout ça pour dire que Hong Kong, c'est sans doute beaucoup de choses, mais c'est avant tout un port. Bien sûr, avec le temps les échanges par voies aériennes (l'aéroport) et surtout les échanges financiers ont pris une importance grandissante, mais le bon vieux port reste un élément essentiel de la ville. En 2004 c'était le plus grand port du monde. Depuis, sa croissance a été lente (comparée notamment à celle de ses concurrents chinois) et il se situe aujourd'hui à la 6e place (le premier port Européen, c'est Rotterdam, à la 11e place). Il n'en reste pas moins que la zone portuaire impressionne par sa taille et génère un trafic incessant. Il est d'ailleurs toujours étonnant, lorsqu'on est à la plage, de voir passer non loin des porte-containers géants, comme des monstres tranquilles. Le week-end dernier, nous sommes allés y voir de plus près. Le dimanche matin, on s'est embarqué avec quelques dizaines d'autres dans une grosse "jonque" (bon, c'est en fait un yacht, mais, à Hong Kong, on dit "jonque" - junk en anglais- et d'ailleurs, d'avril à novembre, on organise volontiers des "junk party" où l'on privatise un bateau à la journée pour aller manger, picoler et se baigner entre amis dans l'une des baies de l'ile). Cette croisière était proposée par un néo-zélandais qui a passé quelques années à trimbaler des conteneurs pour Maerks. Le clou de la journée était une visite des bassins du port. C'était pas mal du tout et très instructif. Bien sûr, il n'y avait rien qu'on ne pouvait imaginer avant d'y aller : des portiques pour charger-décharger, des conteneurs, des porte-conteneurs géants, des porte-conteneurs plus petits pour dispatcher les cargaisons, etc. Mais tout de même : la taille de tout cela impressionne. Des containers, il y en a des milliers, les porte-conteneurs sont comme d'immenses barres d'immeubles : 12 étages (au-dessus de l'eau) et plusieurs centaines de mètres de long, les portiques forment une forêt dense... et très très peu de tous petits bonhommes pour faire bouger tout cela. La visite valait clairement le coup d'oeil et les explications de notre skipper néo-zélandais nous ont apris pas mal de choses (ses histoires de piraterie moderne seront sans doute tout ce dont se souviendront les enfants avec le buffet barbecue).
En revanche, questions parfum, il faudra revenir : ce jour-là, Hong Kong était plongé dans un nuage de pollution hallucinant. Un typhon sur Taiwan empêchant la dispersion par l'est de la pollution chinoise qui du coup stagnait sur nos têtes. C'est bientôt le premier octobre. Il y a 70 ans, le Parti Communiste Chinois fondait la République Populaire de Chine. Toute la Chine se prépare donc à fêter cela avec faste. Toute? Officiellement oui... mais le petit village des irréductibles hongkongais résiste encore et toujours. Les jeunes qui manifestent depuis le printemps dernier ne baissent pas les bras. Toutes les semaines (notamment les vendredis, samedis et dimanches soir), on a ici où là des manifestions en petits groupes et des actions flash, souvent violentes maintenant, avec quelques cocktails Molotov, dégradation de caméras de surveillance ou de machines à distribuer les tickets de métro, et bagarres. Il y a aussi des actions ponctuelles plus rigolotes, comme l'engorgement volontaire des sites de réservations et des accès des restaurants dont les entreprises propriétaires ont trop fièrement proclamé leur attachement à la mère patrie. Be water... Surtout, ces derniers jours, sans doute en préparation de la fête nationale, le ton des manifestants a sensiblement changé. On voit moins de messages et affiches poétiques et moins d'appels à des thèmes purement hongkongais. A la place, des messages plus agressifs, des affiches plus violentes et la montée très nette de discours pro-démocratie et anti-PCC. Carrie Lam (la cheffe de Hong Kong) a finalement décidé de tenter d'aplanir les tensions en commençant enfin à discuter. Ce soir, elle a rendez-vous dans un stade pour papoter avec 150 hongkongais tirés au sort. La version locale du "Grand Débat" en somme. Petite conséquence pour nous : les activités extra-scolaires du lycée français ont été annulées afin que les enfants rentrent avant le début de ce raout et que les bus ne soient pas entravés par les éventuelles manifestations. Conséquence pour Hong Kong : peut-être pas grand chose non plus. Vu que le débat tend à se désintéresser de Carrie Lam et des problèmes locaux, pour se porter davantage sur une contestation du pouvoir Chinois et des appels à la démocratie, il n'est pas certain que cette médiation suffise à rabattre l'ardeur des manifestants. Bref, le programme des festivités a été réduit au minimum cette année (pas de feu d'artifice !), et chacun fourbit ses armes. Les appels à manifester tout ce week end se multiplient avec beaucoup de mots d'ordre contre la dictature Chinoise et Xi. Le (bien peu délicat) slogan "Chinazi" est vite devenu viral mais Sandra, qui suit cela de près, vient de me dire que des appels se multiplient au sein du mouvement pour arrêter de l'utiliser - comme on le sait, il n'est jamais malin d'être le premier à passer le point Godwin. Cette montée en puissance des discours anti-totalitaires raisonne sans doute un peu différemment à nos oreilles abreuvées de médias français. Elle donne aussi matière à repenser un peu certains discours qui font le beurre les éditorialistes. A la fois les discours Lepeno-Giletjo-Melanchonistes qui laissent entendre que la France glisse vers la voie de la dictature avec justice aux ordres, médias contrôlés, et élus non-représentatifs. Mais aussi ceux des jupiteriens, qui nous décrivent la France comme une pseudo-rebelle un peu paumée qui rêve secrètement qu'un roi-président tout en verticalité virile vienne la prendre à la hussarde pour l'emmener vers des avenirs radieux. Comme vous pouvez l’imaginer, nous n’avons pas trouvé beaucoup de monde au sein de la communauté des expats français, pour soutenir sans réserve les gilets jaunes. On n’en trouve pas non plus beaucoup pour critiquer vertement le mouvements de protestations à Hong Kong. Et pourtant, en apparence, les points communs entre les gilets et les parapluies jaunes sont nombreux et il est tentant de comparer les deux révoltes. Des mouvements longs avec des rendez-vous régulier, une exaspération qui conduit à la violence, une vive répression policière (plutôt moins forte à HK qu’en France) et juridique (beaucoup plus forte à HK qu’en France), un rejet des dirigeants et du « système », un fond identitaire, une tendance à la nostalgie "c'était-mieux-avantiste", la volonté d'être mieux écouté par les leaders, et d'être mieux représentés par les institutions, des appels au peuple et à la vraie démocratie, etc. Mais il y a aussi beaucoup de différences entre les deux mouvements. Et elles sont fondamentales. Les protestataires, ici, sont plus jeunes et plus éduqués. Mais surtout, le mouvement est largement indemne de scories populistes et de tendances autoritaires. Il est moins révolutionnaire, dans le sens où il ne cherche pas à scinder la société en groupes dominants/dominés pour renverser l’ordre social et politique. Personne ne cherche à constituer un groupe qui représenterait le « peuple » de Hong Kong pour prendre le pouvoir à ceux qui le détiennent. Il y a juste une population qui souhaite avoir le droit de choisir qui le détiendra. Les médias et la justice, qui ne sont pourtant pas tendres avec eux, ne sont pas intrincèquement les ennemis des protestataires car ces derniers savent l’importance de l’état de droit et de la liberté d’expression : c'est tout ce qu'ils ont en guise de démocratie. Bref, aussi violent et radical qu’il soit, le mouvement de Hong Kong s’inscrit à rebours de cette voie illibérale, où règne l’inversion des valeurs et la distorsion du vocabulaire, où les premiers à s’exprimer au nom du peuple, de la liberté et de la démocratie sont aussi les premiers à s’efforcer d’antagoniser la société, de s’attaquer aux médias, à la justice et aux élus. En fait, la différence fondamentale entre les parapluies et les gilets, c’est que le peuple de Hong Kong connait le sens des mots quand il évoque la démocratie et la dictature. Il sait aussi qui sont ceux qui tordent les mots : il lui suffit pour cela de regarder de l'autre côté de la frontière. Ci-dessous, une petite leçon de novlangue : Le China Daily est le principal journal Chinois en anglais. Et vous aurez aisément reconnu ce pays qui fait tellement de progrès sur les droits de l’homme : c’est celui qui interdit les partis et les syndicats et n’organise pas d’élections libres, qui emprisonne un million de Ouighours, fait disparaitre purement et simplement les opposants, contrôle totalement tous les médias, incite les universitaires à démontrer avec obstination les bienfaits des politiques publiques, manipule les statistiques, interdit les réseaux sociaux et les sites qui n’acceptent pas que l’état puisse accéder librement à leurs serveurs, a réussi à effacer jusque des mémoires individuelles le massacre de milliers d’étudiants par l’armée, utilise des millions de caméras et d’outils numériques pour contrôler les faits et geste de tous les citoyens, réserve les promotions dans l’administration et les entreprises publiques à ceux qui étudient assidument les discours du leader…
Voir les jeunes Honkongais refuser férocement ce qui leur est promis, nous rappelle que la démocratie et la liberté sont des biens précieux sur lesquels il faut veiller sans discontinuer. Dans le même mouvement, cela incite, toujours plus, à ne pas crier à la dictature à tort et à travers, à regarder avec beaucoup de méfiance ceux qui ont tendance à en appeler à un « pouvoir fort » (qu’il soit dans les mains d’un homme providentiel ou le fait d’une dictature du « peuple »), à savoir qu’aller régulièrement aux urnes ne suffit pas à faire une démocratie, et à ne pas confondre la contradiction avec la dictature de la pensée et la justice avec l’absence de droit. Surtout, cela nous rappelle que ceux qui dévalorisent les mots sont les alliés objectifs de ceux qui les manipulent sciemment. Quand un responsable politique occidental crie à tort et à travers au procès politique, quand un autre nous explique qu'on vivrait en dictature au prétexte qu'on-ne-peut-plus-rien-dire, et que les sbires d'un troisième vont à leurs heures perdues casser du manifestant, le travail a priori ardu des journalistes du China Daily devient soudainement un peu plus facile et l'avenir des hongkongais un peu plus sombre. 2019, année de coupe du monde de rugby ! Bien évidement, nous ne pouvions pas passer à côté de cet événement majeur. Bon, si, en vrai, on aurait très bien pu (dû ?) le faire. Mais le fait est que le rugby a soudainement pris une place non-négligeable dans notre quotidien. Cette passion nous est venue par hasard : au mois de juin dernier, le lycée français de Hong Kong a lancé un appel à ses élèves de CM et 6e pour constituer une équipe mixte de rugby à 7 afin de participer à une compétition entre différents lycées français d'Asie, en marge de la coupe du monde... à Tokyo (oui, oui, un petit projet pédagogique, en toute simplicité).
Entrainée par une copine, et sans doute excitée à l'idée de partir en voyage sans parents, Avril s'est dit que oui-pourquoi-pas. Je vous passe les détails de la sélection des joueurs-ses, des entraînements et de cette aventure nippo-rugbistique qui feront l'objet d'un autre billet de blog. Mais une des conséquences, c'est qu'Avril devait se mettre un peu à niveau et que Ulysse s'est dit que courir dans tous les sens et rentrer dans les autres, ça semblait sympa. L'adage préféré des familles nombreuses étant que quand il y en a pour 2, il y en pour 3, Sandra a fini par tous les inscrire au rugby. Les voilà donc enrôlés chez les Tigers, et astreints aux entrainement hebdomadaires... tous les dimanches matin, dès 8h30. Dans un vieux réflexe, sorti sans doute du fin fond de notre cerveau reptilien façonné à l'époque où nous n'avions pas d'enfants, notre première réaction a été de se dire "8h30 ?? Le dimanche ??". Mais on est vite revenus à la triste réalité : de toute façon, nos enfants se lèvent toujours avant 7h, qu'il y ait école ou non. Les entrainements du dimanche matin, c'est donc pas trop contraignant. Et pourtant, les deux premiers ont eu lieu sous une chaleur écrasante et le dernier a démarré par une pluie tropicale surréaliste. Mais, pour l'instant, personne ne se plaint. Il faut dire que, pour les parents, finalement, c'est plutôt bien. Un seul peut embarquer les trois, s'installer dans un coin avec un bouquin, et laisser l'autre parent tranquille pour toute une matinée. Et pour les enfants, c'est plutôt sympa. Il faut voir que le rugby, à Hong Kong, c'est un truc assez sérieux, héritage colonial britannique et forte population australienne oblige. Un des événements culturels majeurs ici c'est le tournois des Sevens (du rugby à 7), qui est une date importante du calendrier mondial de la discipline. Il y a aussi beaucoup d'équipes aux quatre coins du territoire et on voit très souvent des gamins ou des jeunes - et notamement beaucoup de filles - allant ou revenant de leurs entrainements. L'entrainement dominical des Tigers vaut le coup d'oeil. On est à King's Park, un ensemble de terrains un peu en hauteur et donc avec une vue assez sympa. Le dimanche matin, c'est un entrainement reservé aux enfants. Mais, des enfants, il y en a plus d'une centaine ! Tous en jaune et noir, équipés de protège-dents, et répartis par groupes d'age, sur 4 terrains. Ils sont encadrés par des coachs bénévoles. Souvent (très) ventripotents, ils sont 3 ou 4 par groupes et font répéter les gestes techniques : passer, esquiver, plaquer, tomber, libérer le ballon, le protéger, pousser, etc. L'ambiance est bonne, détendue, mais c'est assez sérieux et intensif, même pour les U-7 (under-7) de Pierre. Il paraît qu'il y aura bientôt des compétitions avec les autres clubs, histoire de se frotter un peu aux Pirates de Discovery Bay, aux Sandy Bay de HK University, aux Stingrays de Sai Kung et aux Valley Fort de Stanley. Vu la taille des clubs, il paraît que c'est une foire bigarrée indescriptible. Nul doute que, cette année, les U-7, U-9 et U-10-girls vont faire sauter le panneau d'affichage. Go Tigers ! Pierre est enfin rentré dans la cour des Grands avec le CP. Et pas l'importe quel CP, la classe de CP bilingue ce qui veut dire qu'il a convaincu les enseignants de son potentiel dans les deux langues. Il se retrouve avec la plupart de ses bons copains de l'année dernière. Il y a même deux gamins qu'il connaît depuis la petite section des petits lascars, dont son copain Léon, japono-belge. C'est le seul en tenue de sport sur la photo. L'année a commencé à toute vitesse, avec des tonnes de cahiers dans les deux langues. Normalement les journées alternent français-anglais sur la semaine mais Pierre a toujours un peu de mal avec les jours de toute façon et donc se trimballe l'ensemble de ces affaires dans son maintenant gros cartable.
Il a des devoirs avec relecture de fiche de mots et hélas, il faut bien se rendre à l'évidence, il ne comprend rien du tout: l i ca fait li. Ah ok et donc l i ca fait? silence C'est pas gagné! Mais bon avec Raphaël, Amaury, Léon à rejoindre le matin, il ne se fait pas prier pour aller à l'école. C'est déjà cela. |
C'est nousOn est 5 et on quitte Ménilmontant pour Hong Kong Catégories
Tout
|